Merlimont, le 5/04/06
Mesdames, Messieurs
Permettez-moi, tout d’abord d’exprimer mon plaisir d’être parmi vous pour clôturer cette conférence professionnelle, consacrée à la nouvelle « directive eaux de baignade ». Et si je suis heureux, c’est à plus d’un titre….
Heureux, tout d’abord, parce que je suis Président du Comité de Bassin Artois Picardie et que dans le panel des interventions que j’ai effectuées, depuis 18 mois, il manquait une intervention concernant les eaux de baignade.
Heureux, ensuite, parce qu’en regardant, cette directive européenne, je me retrouve en terrain connu ; En effet, j’y vois noté les termes d’entérocoques et d’échérichia coli, petites bêtes que je fréquentais jadis, assez couramment, dans une profession antérieure.
Heureux, enfin, parce que je suis un authentique produit de la côte d’Opale et que j’ai passé, une partie de ma jeunesse dans un village, situé en bord de mer, village qui, dans le temps abritait des naufrageurs de côte. Alors, la mer du Nord, je connais… Les plages de notre beau département, je connais…. Et les bains de mer, je connais….
A ce sujet, permettez-moi de préciser, tout de suite une chose. Dans les différents postes que j’occupe actuellement, il y a une chose que je supporte très mal et qui a le don de m’exaspérer, c’est ce que j’appelle le poujadisme local, c'est-à-dire la propension tout à fait naturelle qu’ont certains responsables ou élus, à ne se battre que pour leur petit royaume ou leur petites compétences. Alors, une fois n’est pas coutume, je vais m’autoriser à souffrir d’un poujadisme local parce que, je le répète, la côte d’Opale, je la connais bien et que j’ai appris à nager entre Dunkerque et Berck. Et c’est parce que j’ai pris énormément de tasses, parce que je connais le goût de l’eau de mer, parce que je suis imprégné de l’iode de notre rivage que je peux, en toute objectivité vous dire une chose : tous les acteurs de ce territoire ont, depuis des années, extrêmement bien travaillé. Comme diraient les jeunes : il n’y a pas photo !
Quand je me rappelle de l’état lamentable de certaines de nos plages, dans les années 70… Des odeurs nauséabondes de certains lieux de baignades, avec des égouts à ciel ouvert…. De la qualité plus que douteuse de l’eau de baignade…. Et cette eau n’avait qu’un seul intérêt, c’est qu’elle était chargée de tellement d’organismes divers et de produits de toute sorte, qu’elle en devenait un décapant remarquable pour tous les problèmes de peau ou pour les ulcères de jambes…. Tout était nettoyé….. Je ne dis pas qu’après, vous n’aviez pas la gangrène… Mais, en tous cas, l’effet était saisissant.
Oui, je peux affirmer que nous avons fait, que vous avez fait un réel effort et la situation de 2006 n’a rien à voir avec celle des années 1970. Maintenant, nous avons des plages dignes de ce nom et nous avons une eau, globalement digne de cette appellation. Il y a encore, sans doute, par ci, par là, quelques efforts à faire, mais le plus dur a été réalisé et je me dois de remercier tous les acteurs de cette dynamique collective.
L’Europe a décidé de revoir la vieille directive, de lui donner un coup de jeune, de lui payer un lifting. Et dans cette démarche, nos élus européens ont été intelligents, réalistes et concrets. Et comme cela, n’est pas forcément une habitude chez eux, ils en ont d’autant plus le mérite et il faut les en féliciter.
Ils ont, tout d’abord, modifié le nombre de critères… C’est vrai que 19 critères, c’était un peu trop et cela pouvait nous amener à des classements un peu sévères et à des incompréhensions, même si de nombreuses communes ont su remplir ce cahier des charges. Permettez que je prenne un exemple, au hasard et que je fasse un test dans cette salle. Je vais vous demander qui peut répondre aux 19 critères que je vais énoncer… Et n’y voyez aucun parti pris de ma part, ni aucun essai d’influence politique, ni un aperçu sur mes options personnelles. N’y voyez juste qu’un exemple, teinté d’un trait d’humour… Prenez cela comme la blague d’un élu sérieux qui ne se prend pas au sérieux.
Pour être présidente de la République, il faut :
- Ne pas être du sexe masculin
- Ne pas être colérique
- Chausser du 39
- D’être vaccinée contre la fièvre jaune
- Etre brune
- Avoir les yeux verts
- Avoir son permis de conduire
- Ne pas fumer
- Savoir ce qu’est la démocratie
- Parler le serbo-croate
- Avoir visité la Chapelle Sixtine
- Ecouter du Beethoven
- Ne pas se ronger les ongles
- Aller en vacances en Auvergne
- Savoir jouer à la belotte
- Soutenir le PSG
- De ne pas être allergique aux acariens
- Faire du jogging
- Savoir faire cuire des saucisses de Strasbourg
Je suis sûr que, dans cette salle, personne ne répond aux 19 critères. Par contre, si je réduis ces critères à 2, les plus importants …. Pour être présidente de la république, il faut être une femme et être une vraie démocrate. Là, je suis sûr que toutes les dames, ici présentes, répondent aux conditions. Et pourtant, je n’ai pris que 2 critères, en les précisant, voire en les majorant. Cela dit, la démocratie est imprévisible : la présidente sera, peut-être un président….
Cela pour vous démontrer que la modification des directives en fonction des connaissances et de l’expérience est une démarche, on ne peut plus raisonnable.
Ensuite, la directive a modifié le classement. C’est normal. Avant, il y avait des génies, des gens très intelligents et des demeurés… Très humblement, je pense qu’entre les très intelligents et les demeurés, il y a une petite place pour la majorité d’entre nous.
Et enfin, chaque état devra élaborer un profil des eaux de baignade et devra fournir, au public, un maximum d’informations. C’est un souci de communication et de transparence. Dans notre société, cela est devenu incontournable.
Tout cela pour dire qu’après plus de 30 ans d’existence, la vieille directive avait besoin d’être rafraîchie et l’Europe a eut l’intelligence de procéder à ce rafraîchissement. Mais cela n’enlève rien au mérite qu’ont eu beaucoup de collectivités en mettant la qualité des eaux de baignade comme objectif prioritaire de leur action et cela depuis des années.
La mer a longtemps été considérée comme une vaste poubelle, capable de tout absorber, capable de tout digérer. Maintenant, les esprits changent ; la prise de conscience est réelle et nous savons que l’eau est un capital. Et un capital, ça se travaille, ça se soigne, ça se protège. Dans une région comme la notre, vous ne pouvez parler de tourisme si vous n’intégrez pas cette exigence. Et vous savez que le tourisme est porteur d’activité donc d’emplois. Mais je suis sûr que vous en êtes parfaitement conscients, vous les élus côtiers. Sinon, vous ne seriez pas ici, cet après-midi.
Mesdames et Messieurs. Nous avons quelques années pour tout mettre en place, pour encore aller vers la perfection, pour que la côte d’Opale devienne un lieu d’exception, pour que le Pas-de-Calais devienne un lieu d’exemplarité. Mais les années passent vite. Alors, mettez-vous au travail. Les collectivités territoriales et l’Agence de l’eau seront à vos cotés pour cette noble croisade.
Et si vous travaillez bien et que vous remplissez les 19 critères… C’est que vous êtes une perle rare et soyez assuré que je voterai pour vous.
/ Hervé Poher