Question Orale : Certification des comptes des hôpitaux
(Enregistrement de la question)
Madame la Ministre
L'article 17 de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires a inscrit dans le code de la santé publique le principe de la certification des comptes de certains établissements publics de santé.
Mais des commissaires aux comptes demandent, afin de certifier conformes ces établissements, de pouvoir effectuer des rapprochements entre la codification des actes médicaux facturés et les dossiers des patients. Pour cela, ils souhaitent l'accès au contenu des groupes homogènes de séjour, ce qui nécessite la levée du secret médical. Or seul le médecin de l'assurance maladie, lors des contrôles liés à la tarification à l'activité (T2A), a la faculté et sait apprécier la pertinence du codage des actes en regard des dossiers médicaux.
Comme le secret médical s'impose aussi vis-à-vis des personnes tenues au secret professionnel, comme l'a précisé la jurisprudence tant administrative que judiciaire, il conviendrait que les commissaires aux comptes puissent effectuer l'ensemble des contrôles nécessaires, dans l'optique d'une certification conforme, sans avoir à lever ce secret médical.
Dans les faits, le commissaire peut contrôler les procédures d'optimisation de codage (des actes) en ayant accès aux processus de travail des départements d'information médicale (DIM). Il a par ailleurs le résultat de la mission de contrôle T2A du médecin de l'assurance maladie qui lui permet de vérifier l'optimisation du codage des actes. Il peut, aussi, comme l'a fait la Cour des comptes dans ses rapports sur la gestion des hôpitaux, se baser sur l'analyse et l'audit du processus « produits de l'activité », tels que décrits par la direction générale de l'offre de soins et la direction générale des finances publiques.
Mais dans la pratique, certains commissaires ne certifient que partiellement les comptes, s'ils ne peuvent
- soit avoir accès aux dossiers médicaux,
- soit appliquer une solution de contournement, élaborée par la compagnie nationale des commissaires aux comptes, via un audit réalisé à partir d'un échantillon de dossiers par des médecins DIM « experts ». Mais cette procédure, très discutable d'un point de vue statistique, ne garantit pas le secret médical. Demander au DIM de procéder à l'anonymisation d'un échantillon représentatif de plusieurs dizaines de milliers de séjours annuels est difficilement faisable au regard de la mobilisation et du temps qu'il faudrait pour la réaliser.
Aussi, de fait, Madame la Ministre, certains établissements ne sont certifiés que partiellement. Comment fait-on pour résoudre ce problème sans égratigner le secret médical ?
Hervé Poher
(Enregistrement de la réplique)
Réponse à Madame la Ministre
Madame la Ministre.
Merci de votre réponse mais dans la pratique, je ne suis pas sûr que cela puisse convenir à tous nos gestionnaires d’hôpitaux et que ceci respecte complétement le principe du secret médical. Mais, je l’avoue, vous nous avez donné un peu d’espoir.
Je veux bien reconnaitre que le secret médical est quelque chose de bien spécifique et le problème, c’est qu’il ne se coupe pas en tranche : il est global et absolu. De plus, dans le code de déontologie, dans le code de la santé publique, dans le code pénal et dans les multiples jurisprudences, il s’impose même à d’autres médecins quand ceux-ci ne participent pas à l’acte de soin.
Alors qu’il faille un commissaire aux comptes pour vérifier la balance globale (fonctionnement, investissements, recettes, dépenses, amortissements, emprunts…) des hôpitaux, c’est normal !!
Mais pourquoi aller vérifier le codage dans les dossiers ? Peut-être parce ces commissaires ne sont pas toujours convaincus de l’exactitude de certaines démarches… En terme officiel, on ne dit pas « exactitude, inexactitude ou mauvais codage… » ; On dit « procédure d’optimisation du codage ».
Mais je ne vois pas des hôpitaux facturer des appendicites virtuelles, inventer des antécédents ou surcoder des critères… Oublier des actes, par contre, cela peut arriver. Et je ne suis pas sûr que les vérificateurs de l’assurance maladie le signalent systématiquement.
En résumé, Madame la Ministre, l’idéal serait, bien entendu de trouver un expert-comptable, qui en plus aurait fait des études de médecine et qui, en plus, aurait accepté de travailler pour l’Assurance Maladie. Mais ce type de personnage fait partie d’une espèce extrêmement rare… D’autant qu’il y a des inadaptations génétiques évidentes entre les 2 professions.
Il y a quelques années, un haut cadre de l’Assurance maladie nous disait, en commission des affaires sociales et en parlant des hôpitaux, que « Les médecins feraient bien d’apprendre un peu la finance ; cela nous aiderait à gérer… ». Ce à quoi j’avais répondu que « Que Les financiers et les comptables feraient bien d’apprendre un peu la médecine. Cela les aiderait à comprendre.»