La mouche au chocolat
Un conte pour Alexandre.
Le smog couvrait la ville et malgré les néons de quelques magasins déjà allumés, on ne voyait pas le bout de son nez, même si le nez pouvait être grand. Le fond de l’air était épais et même le noir de la nuit était oppressant. De plus, ce soir-là, le noir était… vraiment noir. Piccadilly Circus semblait désert, vidé de tout mouvement, vidé de toute vie.
Et pourtant, ce n’était qu’une impression. Car longeant les façades au nord, un petit bonhomme marchait à petits pas avec ses petits pieds, dans ses petits souliers. Sa tête était petite et ses petits yeux étaient étirés en amande. En petites amandes. Et si ses petits yeux étaient comme cela, ce n’était pas à cause d’une chirurgie esthétique mal réussie ou d’une malformation congénitale du visage mais c’était bien à cause de ses origines : c’était un petit chinois, un vrai petit chinois, un petit chinois de chine et chez les petits chinois, tout est petit. Son nom était Li Clic Clac. Et que faisait un petit chinois de chine, en plein brouillard, à onze heures du soir, sur un trottoir de Piccadilly Circus ? Il allait manger un chien-chaud (Hot-dog dans le texte) et il en avait fortement envie.
En effet, à peine débarqué de son avion, il avait pris la direction du centre-ville, la direction du « Coco Bel œil », restaurant réputé pour ses chien-chauds, les meilleurs d’Europe soi-disant. Avant de quitter Pékin, on lui avait dit de se rendre, dès son arrivée, dans ce fameux restaurant et qu’un honorable correspondant le contacterait.
Cette idée d’aller dans un restaurant le ravissait car, en plus, il avait une faim de loup. Et pour cause. Dans l’avion venant de Pékin, on ne lui avait donné que de la nourriture occidentale et lui, il en avait horreur. Les occidentaux, c’est bien connu, ne mangeaient que des saletés artificielles, lyophilisées et pleines de produits chimiques. D’ailleurs les petits chinois pouvaient dénoncer cette aberration car toutes ces saletés étaient fabriquées en chine. On ne pouvait donc vraiment pas tromper un chinois de chine. De plus, Li Clic Clac, depuis sa plus tendre enfance, dans la campagne autour de Pékin, n’avait mangé que du véritable, que du bio, que du naturel : du pangolin, de la tortue, des sauterelles, du chat, de la chauve-souris, du hamster ou du chien. Que des aliments élevés en local et achetés chez les agriculteurs du coin. Alors rien qu’à l’idée de pouvoir manger du chien-chaud, son estomac s’était mis à crier famine et la salive lui était montée à la bouche… Bouche qu’il avait petite d’ailleurs car c’était un petit chinois.
C’était sa première mission en Europe. Et pour un agent secret, c’est bien souvent la plus dure. Il devait garder à l’esprit tout l’enseignement qui lui avait été inculqué : quelques notions d’anglais, savoir bien se tenir en public, quelques bonnes manières et en particulier ne pas faire pipi sur les pieds d’un policier et surtout, le plus important, on lui avait enseigné un millier de tortures chinoises plus connues sous le nom de BTC (Belles Tortures chinoises). La seule chose qui le contrariait c’était qu’on lui avait dit que la bouffe anglaise était dégueulasse, qu’ils faisaient tout cuire à l’eau chaude et que dans les prisons britanniques, on vous obligeait à manger des rillettes au sucre. D’où le nombre important de suicides chez les prisonniers. Alors, trouver du chien-chaud dès son arrivée, pour lui, c’était un miracle.
En entrant dans le Coco Bel Œil, il vit tout de suite qu’il y avait la queue devant le fourneau du cuisinier. C’était, à n’en pas douter, pour avoir du chien-chaud. Et discipliné comme tous les petits chinois, il prit sa place dans la file. D’un œil, il épiait les clients du restaurant espérant reconnaitre son contact ; de l’autre, il se concentrait sur son petit dictionnaire de traduction chinois-anglais. Le dictionnaire est petit parce que, chez les Chinois, comme je l’ai déjà dit, tout est petit. En effet, son anglais n’était pas parfait et il craignait que le cuisinier comprenne mal sa commande. Un grand noir se plaça dans la file juste derrière lui. Li Clic Clac se retourna et, lui faisant un clin d’œil, il dit : « Tu dois sortir ton perroquet. ». C’était le mot de passe. La réaction du grand noir fut violente : « Espèce de salopard ! Obsédé ! Chinetoque dégénéré ! Je vais te foutre une raclée ! » Empoignant Li Clic Clac par le revers de la veste, il s’apprêtait à lui écraser le nez avec le poing quand intervint un type très classe, très racé, très smart, avec un nœud-papillon et un monocle :
" S’il vous plait, cher monsieur. Excusez ce pauvre petit chinois, il ne parle pas bien l’anglais. Il a commis une erreur, une grossière erreur, une erreur de jeunesse.
- N’empêche qu’il m’a dit de sortir mon perroquet !
- Et alors ?
- C’est honteux ! c’est interdit ! Et on est dans un lieu public ! Et je ne sors pas mon perroquet comme ça, devant tout le monde et pour n’importe qui !
Le nouveau venu s’appelait JAP et son flegme était connu dans le monde entier :
" Très cher. Ce n’est pas ce qu’il voulait dire. Il ne comprend pas bien les subtilités de notre langue. Il s’excuse et je vais l’accompagner pour l’aider."
Devant le calme du nouvel intervenant, le grand noir ravala sa colère et, dégouté, quitta la file. Le sauveur se mit à coté de Li Clic Clac et lui dit :
" Faites attention à ce que vous dites et à qui vous le dites.
- Mais ça, mot de passe ! Moi, dois dire ! Sinon torture chinoise numéro 654 !
- Oui, je sais mais c’est à moi qu’il fallait le dire… Je me présente. Agent James Alexander Power, plus communément appelé JAP. Agent britannique N° Pi 3,14116.
Eh oui, c’était JAP, espion dont le charme, l’habileté, l’intelligence, la mémoire, la puissance, la perspicacité et la pointure des pieds étaient mondialement connus.
" Moi Li Clic Clac. Fils de Li Cou Chette et de Li Aba Reau. Ji travaille pour services secrets chinois. Et toi, tu dois sortir ton perroquet.
- Chut ! On va d’abord manger. Pour le perroquet… On verra après.
Arrivés devant le cuisinier, ils commandèrent deux chien-chauds et, une fois servis, s’isolèrent à une table dans un coin d’ombre.
" Ça, pas du chien ! ça saucisse de taureau ! Pas bon ! Moi vouloir chien. Sinon torture 412… s’écria le chinetoque.
- Oui, je sais répliqua JAP. Mais ici, en Angleterre, on ne mange pas de chien. Chien-chaud, c’est une dénomination qui n’a rien à voir avec les chiens.
- Et un croque-monsieur… Vous pas mangez les messieurs ?
- Bien sûr que non ! C’est aussi une expression…
- Et sortir le perroquet…
- N’insiste pas… On est peut-être écoutés ! Nous devrions parler avec des phrases codes.
- Attendez, moi prendre petit lexique pour phrases codes.
Après avoir feuilleté son petit livre rouge, Li Clic Clac affirma pompeusement :
" Une femme de cent kilos s’appelle un cachalot."
Après quelques secondes de réflexion, JAP répliqua :
" Mais le cannibale gourmet préfère la viande âgée."
Et un dialogue bizarre s’instaura entre les deux espions, dialogue incompréhensible pour les non-initiés.
" L’américain dévot s’épile au chalumeau, ajouta Li Clic Clac
- L’ascaris de Morphée n’aime pas le cassoulet.
- Les bonbons de René sont tout ratatinés.
- Le facteur dépressif a trop de morve au pif.
- Le chauve aux gros mollets sent bien trop fort des pieds.
Et à chaque expression, le petit chinois consultait son livre afin de trouver le sens de ce message si secret.
" Le débile des Carpates a trop de poils aux pattes.
- L’escargot de Bourgogne a une épouse trop conne.
- Non s’écria JAP. C’est trop grave ça ! Il faut que j’en avise mes supérieurs.
A cet instant précis, un homme poilu avec du poil aux oreilles et dans le nez s’approcha d’eux et posant une main poilue sur l’épaule de JAP, il se pencha et lui susurra à l’oreille : « La femme du boulanger a l’abdomen gonflé… Je répète… La femme du boulanger a l’abdomen gonflé. » Puis, l’homme aux genoux poilus se dirigea vers le bar où il commanda un whisky-grenadine. JAP, dont le calme olympien était connu dans le monde entier, fronça les sourcils doucement et se tournant vers Li Clic Clac annonça :
" C’est une alerte. Nous avons été dénoncés. Il est urgent de partir.
- Oui mais comment ?
- La belle-sœur du négro arrive en pédalo.
- Ça veut dire quoi ? Moi pas avoir de belle-sœur dans mon livre de codes.
- Ça veut dire qu’une jonque nous attend sur la Tamise.
Une jonque ? Oui, une jonque, c’est-à-dire un bateau chinois ! En effet, le MI5 (services secrets britanniques) avait fait venir, en pièces détachées, spécialement de Hong-Kong, une jonque à rames, à voile et à moteur. Tout cela pour que l’espion chinois ne soit pas trop dépaysé et déstabilisé. Dès qu’un espion est sorti de son milieu naturel, il est bien souvent perdu. Surtout les petits chinois.
Les deux compères sortirent discrètement du Coco Bel Œil et se dirigèrent vers la Tamise. Mais, rapidement, ils s’aperçurent qu’ils étaient suivis par deux obèses. Oui des obèses, avec de gros bras, de gros genoux, de gros pieds, de gros nez… Or les obèses, dans les récits d’espionnage, sont souvent des espions russes. Et ces russes-là n’étaient pas n’importe quels russes : c’était la fine fleur du KGB (Krosse Grapule Bolchévique). C’était l’obèse Igor Gonzola et l’obèse Vladimir Obolan, des hommes sans retenue, des tueurs implacables, des monstres de cruauté… comme tous les Russes. Et dans leurs poches d’obèses, ils avaient tout l’attirail pour trucider les espions étrangers : des couteaux suisses à six lames, cinq ou six révolvers, des bazookas, des bombes à hydrogène, des tanks Sherman, une scie électrique, des perceuses, du poison, des chalumeaux, un marteau-piqueur et, summum du raffinement sadique, des bouteilles de vodka frelatée. C’étaient, sans aucun doute, les deux experts mondiaux les plus efficaces dans l’art de la torture et de la mise à mort.
Mais JAP les avait tout de suite repérés.
« Le vélo du manchot a un guidon en trop. » glissa-t-il dans l’oreille du petit chinois. Cette phrase était l’un des codes les plus complexes du monde des agents secrets. Et en quelques mots, ce code voulait dire : « Allez ! On se sauve ! Les Russes sont des obèses et nous pourrons les semer rapidement ! Tu prends la première à droite puis la deuxième à gauche. Arrivé à la Tamise, la jonque sera amarrée au numéro 94. On saute dedans et on met les voiles, surtout que la voile de la jonque est neuve puisqu’elle a été achetée chez Décathlon la semaine dernière par le troisième secrétaire de l’ambassade à Londres qui est cousin avec le garde-champêtre de Brigitte Macron. » Je vous l’avais bien dit que cette phrase-code était complexe. Alors, arrêtez de râler.
Le temps que Li Clic Clac traduise la phrase code, les deux gros s’étaient rapprochés. Et ils préparaient leurs crimes. Igor avait dans la main droite une bouteille de vodka pour asperger l’adversaire et dans la main gauche, un chalumeau pour mettre le feu à la vodka. Quant à Vladimir, il avait sous le bras droit un bazooka et dans la main gauche une statuette de Vladimir Poutine qui était son idole. Et foutre un coup de Poutine sur le crâne d’un ennemi, c’était une torture efficace, innommable, redoutée et réputée.
JAP, dont l’esprit d’analyse était connu dans le monde entier, comprit rapidement que la réaction devait être brutale. Il sortit de sa poche intérieure une photo cartonnée et se retourna brutalement. Brandissant la photo devant les deux obèses, il s’écria : « Vade retro, suppos du collectivisme bolchévique. » Les deux obèses, surpris par la volte-face de l’anglais, ne purent s’empêcher de regarder la photo tendue par JAP, connu dans le monde entier pour sa rapidité. A la vue du portrait affiché devant eux, les deux Russes s’écroulèrent, furent pris de hoquets, de soubresauts, de tremblements se terminant par des convulsions avec de la bave aux lèvres. Pendant ce temps, Li Clic Clac, appliquant la torture 589, s’était accroché à la jambe d’un des deux russes et lui mordait goulument le mollet. Les pauvres slaves se tordaient de douleur et, rapidement, dans un dernier sursaut, ils arrêtèrent de respirer. C’était aussi bien pour eux ; la souffrance était devenue insoutenable.
Les ruskofs éliminés, JAP et le petit chinois de Chine pouvaient reprendre leur course folle vers la Tamise.
" Mais toi avoir montré quoi ? demanda Li
- Une photo de ma grand-mère qui est d’origine française.
- Et alors ?
- Elle est française et surtout guinoise ! Et ça, les Russes ne le supportent pas. Pour eux, c’est pire que la peste ou la bombe atomique.
- Ça est l’arme absolue ?
- Exact, petit chinetoque ! C’est ce qu’on a trouvé de mieux dans l’art d’éliminer les adversaires. Et c’est une invention française.
- Moi pas avoir ça dans la liste des tortures chinoises. »
Tout en parlant, ils arrivèrent sur le quai du fleuve. Ils cherchèrent le numéro 94. JAP, dont la logique était connue dans le monde entier, affirma « 93, c’est avant et 95, c’est après. » Ebloui par tant d’intelligence, Li approuva… Même s’il ne savait compter que jusque 23. Au numéro 45, ils tombèrent nez-à-nez avec un éphèbe, un homme d’une beauté stupéfiante, une statue vivante. « Oh, les 2 fantômes… Connaissez-vous les mots de passe ? » JAP et Li, d’un air méfiant laissèrent échapper : « Tu dois sortir le perroquet. » L’éphèbe se décontracta :«
" Je me présente dit-il. Armando Liprane ; je suis italien, habillé par Cerutti, coiffé par Susausépi et parfumé par Salami. Vous êtes bien les espions angliche et chinetoque ? »
Devant cette incarnation de la beauté mâle, JAP et Li ne purent, tout en restant méfiants, que hocher de la tête. « Je le savais, continua l’italien. Et j’ai une proposition à vous faire. » Devant ce danger inattendu, JAP décida de reprendre le langage codé.
" Le lapin andalou va sucer des cachous.
- Le policier bulgare a fumé un pétard répliqua LI, signifiant par là qu’il avait compris le message. Son cerveau de petit chinois commençait à s’habituer au langage compliqué."
L’italien reprit la parole. « Voilà. Je vous propose de partager les risques. Car vous risquez de perdre vos vies. Les services secrets russes ne vont pas se laisser faire. Toi, le buveur de thé, je te propose un séjour à Rome, tous frais payés, avec spa, télé grand écran, savon parfumé au pastis et servante très gentille Quant à toi, le bouffeur de riz, tu peux venir sur ma gondole, gondole à rame et à moteur, et nous ferons une bamboula comme jamais tu n’en as connue. Ma gondole est juste là, au numéro 57. » En effet, les services secrets italiens avaient fait venir, spécialement, une gondole vénitienne sur la Tamise… Ce qui pouvait éveiller la curiosité des londoniens car, il faut l’avouer, voir sur la Tamise une gondole pas loin d’une jonque, cela pouvait être troublant, voire inquiétant.
JAP, dont la perspicacité était connue dans le monde entier, comprit tout de suite les intentions belliqueuses et malfaisantes du rital parfumé. Il lui rétorqua
" Le cochon italien se vend, même, à Berlin. "
Ce qui voulait dire, pour un anglais digne de ce nom, « Va te faire foutre chez les grecs ! ». En effet, les sujets de sa gracieuse majesté trouvaient que « se faire foutre » était un peu vulgaire et que les grecs, depuis la chute de Troyes, ne méritaient pas d’être cités dans une expression courante. Du coup, plutôt que foutre, ils préféraient vendre et les Grecs étaient remplacés par les teutons. Et en un quart de seconde c’est-à-dire 25 centièmes de seconde, le bel italien fut neutralisé. JAP lui avait asséné une violente manchette sur la carotide et Li Clic Clac lui appliqua le supplice chinois numéro 758, c’est-à-dire qu’il lui enfonça une banane dans chacune des narines. Manquant brusquement de souffle, l’italien s’écroula, inanimé.
" On n’a pas idée de mettre une gondole sur la Tamise ! s’écria JAP. Allez la jonque nous attend."
Ils allaient atteindre l’embarcation, quand venant des ténèbres et rebondissant sur le mur des hangars désaffectés, ils entendirent un cri horrible, un cri de femme en frayeur, un hurlement de suppliciée, un cri de souffrance comme une cuisinière qui aurait laissé bruler sa quiche lorraine. Puis sortant de l’ombre, ils virent un groupe de mauvaises personnes avec de mauvais visages et, évidemment, de mauvaises intentions. Le premier d’entre eux tenait prisonnière, une grande blonde portant un chapeau tyrolien (ce qui est étonnant car les anglais ne portent pas ce genre de déguisement) ; elle était vêtue d’un kimono (ce qui est étonnant car les japonaises sont rarement blondes), aux cheveux cascadant sur ses épaules nues (ce qui est étonnant car un kimono est rarement avec les épaules nues) et des souliers à hauts talons (ce qui est étonnant car les asiatiques portent rarement des talons hauts… même s’ils sont petits).
Toutes ces incohérences firent tiquer JAP qui avait un sens de l’observation connu du monde entier. Li Clic Clac, lui aussi, trouva étrange l’accoutrement de cette japono-suédo-bavaro- pin-up. Et les 2 compères en déduisirent : « Pour être si mal fringué, ce ne peut être qu’une américaine… Et les mecs… Avec des airs aussi mauvais, ce sont forcément des Américains ». JAP décida de partager ses déductions avec son associé chinois. « La langue de l’iroquois sent toujours le putois. » Après avoir consulté la traduction, Li répondit : « Mais le pêcheur d’Islande fait pipi sur la lande. »
Ils s’étaient compris. Cela signifiait qu’ils devaient appliquer le processus d’attaque connu sous l’appellation DX238WWKZ564 dans le manuel du parfait espion britannique et sous la dénomination TUPICOFESSE numéro 498 dans le bréviaire des plus belles tortures chinoises.
Plus rapides que l’éclair, plus agiles qu’un ouistiti, plus visqueux qu’une limace, nos 2 héros s’élancèrent sur le groupe yankee. Les dents volaient, le sang giclait, les murs étaient tapissés par des morceaux d’intestin ; un bras fut jeté dans le port, un œil se retrouva dans la tasse d’un vieil anglais qui buvait son thé non loin de là, la fausse blonde se retrouva sans perruque (on s’aperçut ainsi que c’était un homme chauve). Bref, le combat fut explosif et sans pitié. Mais après 6 minutes 33 secondes et 7 dixièmes, le combat cessa… Faute de combattants. Tous les ricains étaient en morceaux.
" Dis, toi savoir pourquoi tous ces gens attaquent nous ? interrogeât Li qui trouvait que ça commençait à faire beaucoup. Monde entier contre nous. Quoi qu’ils veulent ? "
Jap, voyant son compère très inquiet, décida de le mettre enfin au courant.
" Voilà Li. Nos 2 pays ont décidé de partager un grand secret mais il faut impérativement que les autres restent dans l’ignorance. Et surtout, ne le divulgue à personne car ça peut changer la face du monde et entrainer une guerre nucléaire.
- Promis, juré. Moi être bouche cousue.
- Ce secret, c’est simple. Dans nos 2 pays, tous les laboratoires de recherche se sont mobilisés pour trouver de nouvelles armes chimiques, contre le Covid, contre l’administration des permis de conduire, contre le syndicat des éleveurs d’escargots, contre les anciens combattants et contre tous nos ennemis en général et en particulier.
- Pourquoi anciens combattants ?
- Comme ça ! Mais au bout de quelques mois de recherche, un savant britannique dont l’arrière-grand-oncle de la mère du cousin germain était chinois trouva une formule extraordinaire qui pourrait révolutionner les pratiques culinaires sur la planète entière. C’est pourquoi tu as été envoyé ici ; c’est pourquoi nous devons protéger ce secret ; c’est pourquoi il est important d’éliminer tous nos adversaires ; c’est pourquoi le mot de passe était « Tu dois sortir le perroquet. »
- Et pourquoi sortir le perroquet ?
- Parce que la mère du grand chef du MI5 est devenue dérangée de la tête. Elle a été enfermée dans un asile et passe son temps à agresser les hommes en disant « Tu dois sortir ton perroquet. » Ce qui n’est pas convenable.
- Je comprends. Mais le secret, c’est quoi ?
- Ils ont trouvé le moyen de transformer l’ADN des mouches et celles-ci font des excréments… en chocolat… C’est terrible !
- Caca du chocolat ! Mais caca de mouche, c’est petit !
- C’est vrai ! et pour faire un bon dessert, il faut beaucoup de mouches. Donc nos 2 pays sont en train de faire construire des centres d’élevage de mouches. Et nous deviendrons les maitres du monde… Car aucun soldat ne résiste à une bonne mousse au chocolat.
- Vous occidentaux êtes diaboliques."
Sur cette évidence, les 2 espions embarquèrent sur la jonque et prirent le chemin de l’Asie en passant par la manche, la mer du Nord, l’océan Atlantique, le canal de Panama (où ils durent payer en liquide car la carte bleue de JAP ne marchait plus), l’océan Pacifique, la mer des Philippines, puis Hong-Kong. Le voyage fut long et éprouvant mais ils avaient emmené un gros stock de mouches et ils purent ainsi se nourrir agréablement.
Après quelques jours de repos et de débriefing, ils furent officiellement remerciés, félicités et décorés par le gouvernement chinois. A Moscou, Rome et Washington, les ambassades chinoises et britanniques furent momentanément fermées, en signe de protestation contre la perfidie des nations soi-disant alliées.
Avant de repartir vers de nouvelles et terribles aventures, Li Clic Clac voulu faire visiter Hong-Kong à son collègue devenu son ami. Et tandis qu’ils circulaient dans un quartier de Kowloon, une vieille chinoise, sans dents, habillée comme une pauvresse et avec un billet de 100 yuans à la main s’approcha de JAP et dit
" Yoca tifotu nicar. Glosek Mati rolmops.
- Ce qui veut dire ? s’étonna JAP
Li Clic Clac eut un sourire malicieux et fit la traduction :
"Elle dit Toi être très beau et demande si toi pas sortir ton perroquet… Elle, prête à payer !"
Et ils éclatèrent de rire tous les deux.
Même Yan Flemming n’aurait pas pu inventer une si belle histoire…