Intervention en tant que Président du Comité de Bassin Artois-Picardie/ Hervé Poher
Permettez-moi de dire un petit mot en tant que Président du Comité de Bassin de l’Agence de l’Eau.
Il y a un peu plus de 18 mois, fin janvier 2010, je devais aller à l’hôtel de Roquelaure. Les mauvaises langues diraient « Qu’allait faire Poher dans un Hôtel ? ». Non, l’Hôtel de Roquelaure est une vieille bâtisse du XVII ou XVIIème siècle, situé boulevard Saint Germain, et où est situé le ministère de l’environnement et du développement durable.
Je devais, ce jour là, déjeuner avec le ministre de l’environnement, Jean-Louis Borloo et avec la secrétaire d’état Nathalie Kosciusko-Morizet. Vous vous dites que j’avais beaucoup de chance… Mais je vous assure que j’aurais volontiers cédé ma place pour tout l’or du monde. Car j’étais là pour faire quelque chose qui me déplaisait souverainement ; je devais faire quelque chose qui m’est insupportable et si j’avais pu me glisser dans un trou de souris, je l’aurais fait volontiers. J’étais là pour demander une faveur… Je m’explique.
La Directive Cadre sur l’Eau, la fameuse DCE, a dit qu’on devait obtenir, pour 2015, un bon état écologique de toutes les masses d’eau… Et cela pour tous les pays de l’Union Européenne. Très rapidement, on s’est aperçu que se serait difficile, voire intenable. Alors, on a rediscuté et finalement, pour 2015 et pour le France, il ne faudra pas 100% des masses d’eau, mais seulement 66% de ces masses, en parfait état écologique.
Et moi, j’étais à Paris pour demander une exception pour le bassin Artois Picardie. Je devais demander le droit de n’atteindre que 50%. Alors que la moyenne de la France était de 66%, nous, nous ne devions atteindre que 50%...
Pourquoi cela ? A cause de l’histoire et à cause de notre environnement. Dans notre région, nous devons assumer un lourd passé industriel et industrieux avec de nombreuses friches et des zones pollués. Ensuite, nous avons subi la construction de centre urbain, de mégapoles, en particulier dans le bassin minier et l’assainissement n’a pas bien suivi. Enfin, et il ne faut pas l’oublier, nous sommes avant tout une grande région agricole ! L’agriculture occupe 80% de notre territoire… Mais, c’est vrai, nous donnons l’imager d’une région très urbaine. Et, il n’est pas honteux de dire que, pendant des décennies, les agriculteurs ont usé et abusé des produits phytosanitaires, des pesticides et des engrais. Et tout cela se retrouve dans l’eau. Je le dis d’autant plus qu’il faut reconnaitre que le monde agricole a fait beaucoup d’efforts ces derniers temps.
Voilà pourquoi, il est plus difficile, chez nous, d’arriver à un bon état écologique… Même des grands bassins y arrivent plus facilement. Je pense à Seine-Normandie, bassin dans lequel se trouve Paris… Et bien, Seine-Normandie va respecter et atteindre aisément l’objectif des 66%.
Alors vous pouvez comprendre pourquoi je n’étais pas fier en allant à Paris… Imaginez : je suis Président depuis 2004 et je dois avouer que le bassin est incapable de respecter les engagements nationaux ! Et ce d’autant que quelques années auparavant, en 2006, madame Nelly Olin, ministre de l’environnement nous avait dit, à Lille, que nous étions vertueux « car nous faisions beaucoup de choses sans augmenter trop les redevances… ». Alors, un vertueux qui demande un traitement d’exception !!
Bien entendu, nous avons eu notre dérogation car le terrain avait été préparé par les services et les directeurs d’agence, mais, honnêtement, je n’étais pas fier.
Alors vous pouvez comprendre pourquoi je suis heureux, aujourd’hui, de participer au lancement de 3 stations d’épuration. Vous allez dans le bon sens ; vous intervenez sur l’eau et l’eau est un élément indispensable, incontournable… Et vous le savez, l’eau, c’est 70% du corps humain… Bref, vous allez dans le bon sens.
Deux petites remarques pour terminer. J’ai bien entendu les remarques du Président Rivenet et je connais bien ces réflexes d’élus et de responsables locaux. Vous voulez plus de subventions. Mais quand je vois les chiffres à Licques… On vous donne, avec l’avance remboursable 80% de subvention… De toute façon, vous ne pouvez pas avoir plus, c’est interdit… Je sais, nous en avons souvent discuté, l’avance remboursable n’est pas considérée par les élus comme une subvention ! Mais légalement, c’est une subvention Et, quand je regarde l’ensemble des chiffres, aujourd’hui… On vous donne plusieurs millions d’euros… Alors, il ne faut pas jouer trop souvent les « monsieur plus »… Le monsieur Bahlsen… Celui qui donne un coup d’épaule pour augmenter les doses…
Autre remarque : vous avez parlé du 10ème programme. Et bien justement, nous sommes en train de l’élaborer ce programme et nous prendrons en compte, bien entendu, toutes les remarques des élus locaux… sur l’assainissement, collectif ou non-collectif et sur bien d’autres sujets.
Dernière chose enfin. Madame Pollaert a dit qu’elle aurait sa station dans 9 mois, une grossesse de femme. Moi, je lui signale que je fais partie d’une organisation où il y a beaucoup d’éléphants. Et je tiens à rappeler que chez les pachydermes, la grossesse est de 18 mois. Alors, si elle s’en tire avec 9 mois, elle aura beaucoup de chance !
Hervé Poher