Arras, séance plénière.
Je dois vous présenter et, si possible vous faire valider les grands axes d’une politique du cyclable, pour notre département.
Sachant que ces grands axes peuvent répondre en tout ou en partie aux exigences du
Plan Stratégique Départemental voté le 26 mai 2008,
A l’Agenda 21, voté le 30 juin 2008,
Au Schéma de la mobilité voté le 20 février 2012,
Et aux orientations mobilité du Pacte Jeunesse validé le 17 décembre 2012,
Tout cela continuant une action entamée en 1997 par la mise en place d’un schéma directeur des itinéraires et pistes cyclables.
Quelques points de synthèse :
Il faut avoir l’honnêteté de reconnaitre que notre département est très peu équipé en structures pour mobilité douce. Il suffit de faire 30 kilomètres et d’entrer en Belgique pour se sentir un peu pauvre… Comme il suffit de descendre dans la Somme, pour se dire que nous avons encore des progrès à faire.
Et si nous sommes « sous-équipé », excusez-moi le terme, ce n’est pas forcément par un manque de volonté, ce n’est pas forcément par une non-prise de conscience… C’est, je le crois, le fruit de la conjonction de plusieurs facteurs :
Facteur dimension départementale, c’est à dire le constat que notre département soit grand. Certes, nous ne sommes pas le plus grand mais par rapport aux autres grands départements, nous avons une densité de population nettement plus importante… Ce qui veut dire que nous avons un nombre de communes plus important… Donc un réseau routier plus étendu… Et il est parfois très difficile de se concentrer sur l’essentiel tout en imaginant le superflu… Car, excusez-moi de le dire, dans la tête de beaucoup de décideurs, faire du cyclable, c’était, jusqu’à présent, encore du superflu…
Facteur géomorphologique : Il faut bien l’avouer, il faut être un pratiquant de l’autopunition et de la mortification pour tout faire à vélo quand on habite dans les monts d’Artois, dans l’arrière-pays boulonnais ou dans le Ternois. C’est quand même plus facile de faire du vélo dans la plaine des Flandres. C’est vrai qu’une grande partie de notre territoire est faite de monts et de collines et cela n’aide pas à une conception uniforme d’un réseau cyclable.
Facteur historique aussi probablement : car les grandes entreprises de notre région avaient l’habitude de mettre en place des systèmes de ramassage des ouvriers qui habitaient parfois fort loin du lieu de travail. Le vélo n’était pas un moyen d’aller au boulot.
Facteur financier aussi : Pour assumer certains transferts de compétence, devant certaines urgences d’aménagement du territoire et face aux crises économiques successives, il semblait plus judicieux de concentrer les moyens sur d’autres dossiers que celui du vélo. De plus, réflexe financier classique : on ne dépense pas sur ce qui peut paraitre superflu.
Bref, pour plein de raisons qui sont parfaitement défendables, le cyclable ne faisait pas partie des priorités départementales. Or, cette position n’est plus défendable… Pour des raisons économiques et pour des raisons environnementales :
Raison économique d’abord car, vous le savez, le coût de l’énergie ne fera que croitre et embellir. Même si nous réussissons la transition énergétique, le prix de l’énergie va continuer à monter. Certains disent même que cette transition accentuera cette inflation. Mais il faut savoir que des gens qui tombent sous le seuil de pauvreté uniquement parce qu’ils doivent payer leurs factures d’énergie, c’est de plus en plus courant et qu’ils sont de plus en plus nombreux. Alors, autant les aider à circuler autrement. L’énergie musculaire ne coûte que les calories qu’on avale et le sucre coûte quand même moins cher que le pétrole.
Raison environnementale ensuite : Même si l’on sait que l’automobile n’est pas le plus gros producteur de gaz à effet de serre, c’est quand même un pourcentage non négligeable et on se doit, dans notre engagement à lutter contre le changement climatique d’inviter, d’inciter les gens à pratiquer les modes de déplacements doux.
La démarche, les raisons et les freins ayant été rappelés, permettez-moi de rappeler quelques grands principes de ce schéma :
Il faut que le réseau soit cohérent et continu et qu’il fasse partie d’un maillage territorial. Ce maillage n’a d’intérêt que s’il peut servir pour tous les actes de la vie quotidienne : aller à l’école ; aller faire des courses ; aller à la maison des services publics ; aller se promener…
En complément de ce que je viens de dire, il faut que ces maillages aient des points d’ancrage sur les collèges et sur les points d’intermodalité, les endroits où il peut y avoir une rupture de charge (les gares, les centrales de bus, les aires de covoiturage…)
Parallèlement à cette politique de maillage, il faudra continuer à participer aux grands projets structurants que sont les Vélo routes Voies Vertes permettant ainsi d’avoir quelques épines dorsales et permettant, aussi, de nous connecter avec les départements et les pays voisins.
Enfin, il est apparu évident qu’il fallait relier au maillage, certains sites touristiques majeurs : Le Louvre Lens, Le château d’Hardelot, Le Site des Caps, le Parc d’Olhain, Le Marais Audomarois…)
Après les objectifs, parlons des moyens pour y arriver :
Tout d’abord, continuer à travailler avec la Région pour les projets de Vélo routes Voies Vertes
Ensuite, travailler, dans le cadre de la contractualisation, avec les EPCI et les communes pour qu’il y ait une véritable réflexion, en amont, sur tous les aménagements possibles.
Enfin, faire que dans nos services, la composante vélo soit intégrée dans tous les nouveaux projets routiers.
Et c’est comme cela, qu’à terme, le vélo pourra s’imposer véritablement comme une pratique de transport, une pratique récréative et une pratique touristique. J’ai volontairement omis la pratique sportive car on sait que les cyclistes sportifs préfèrent utiliser la route plutôt que les équipements spécifiques.
Le document que vous avez dans le tome 2 du rapport du Président résume toute la démarche et les grands axes de notre volonté.
Pour en terminer, permettez-moi de formuler à nouveau la question d’aujourd’hui car pour diverses raisons, nous sommes au moment d’un choix :
Ou nous restons avec nos réflexes gestionnaires et nos sourires entendus quand on parle du vélo, considérant encore le vélo comme un gadget et un amusement …
Ou nous parions sur un changement de comportement du consommateur, du citoyen et des collectivités parce que le vélo, c’est pratique, ce n’est pas cher et c’est bon pour la santé…
Bref, en votant cette délibération, on ne valide pas uniquement un projet d’aménagement du territoire ; on fait aussi un pari sur une évolution sociétale. Et permettez-moi d’ajouter qu’étant donné la tournure que prennent les choses, parier sur une évolution sociétale obligatoire des modes de déplacement, ce n’est pas un pari très risqué.
Hervé POHER