Réception d'enfants à Cité-environnement, à Arras. Journée mondiale de l'eau
M, M, Mes chers enfants.
Lorsqu’on m’a demandé de bien vouloir clôturer cette journée d’information et d’échanges, je me suis dit : » Comment, devant des enfants, est-il possible de faire passer un message
-Comment faire passer un message sans user d’un langage politique, qui ne les intéresse pas ( et c’est tant mieux pour eux).
-Comment faire passer un message sans user d’un langage technocratique, qu’ils ne comprennent pas (et c’est tant mieux
pour eux).
-Comment faire passer un message sans s’inscrire dans cette démarche, très à la mode, qui veut que certains disent
« Ya qu’a, faut que » et qui, pourtant, ne font jamais rien. »
Non, ce n’était pas évident et la solution que j’ai adoptée, c’est de ne pas être un élu, de ne plus être un responsable formaté par les obligations administratives et de sortir de cette attitude, si souvent révoltante, qui vous montre des adultes surs de leur savoir et imbus de leur pouvoir.
J’ai donc décidé d’être un simple citoyen, un simple père ou un simple futur grand-père ; grand-père qui devra parler, un jour, à sa
petite fille ou à son petit fils. Et, tout naturellement, un mot m’est venu à l’esprit, le premier mot que je me devrais de dire à mes
petits enfants….. Et ce mot, c’est « PARDON «
PARDON, de vous donner un monde abîmé, un monde traumatisé, un monde ulcéré.
PARDON de vous léguer un monde où l’air n’est plus pur, où l’eau est souvent polluée, où l’on détruit des forêts, parfois, centenaires et où on voit, chaque jour, disparaître des espèces d’animaux, qu’on ne verra plus jamais.
PARDON de vous offrir une terre qui se réchauffe et où le climat est en train de changer.
PARDON d’avoir vécu, pendant plus d’un siècle, en ne pensant qu’au présent sans se préoccuper de l’avenir.
PARDON, enfin, de ce que nous avons fait et PARDON, surtout, de ce que nous n’avons pas fait.
La responsabilité d’un adulte, c’est aussi de savoir reconnaître ses erreurs. Et au nom de tous, je vous demande PARDON.
Mais, si nous avons fait des erreurs, mes chers enfants, il faut savoir pourquoi. Pas pour nous excuser, mais bien pour éviter de les recommencer.
Depuis plus d’un siècle, nous avons demandé aux industriels, aux grands acteurs de l’économie et à tous nos responsables de créer de l’activité, de bâtir des usines et de fortifier le développement économique. Et cela n’avait qu’un seul but : Donner à vos grands-parents et à vos parents du travail et les moyens de vivre descement. L’intention était bonne, mais la méthode était imparfaite.
Depuis plus d’un siècle, nous avons demandé à ces mêmes grands capitaines de l’industrie de produire encore plus et, surtout de produire encore moins cher pour que tout le monde puisse avoir accès au progrès, à la technologie et au confort. L’intention était bonne, mais la méthode était imparfaite.
Depuis plus d’un siècle, nous avons demandé à nos paysans, à nos agriculteurs de produire encore plus de viande, plus de légumes, plus de céréales et, surtout, on leur a dit : « Il faut produire plus, mais il faut que ça coûte moins cher ». Il fallait faire tourner l’économie et il fallait, avant tout, que les gens puissent se nourrir. L’intention était bonne, mais la méthode imparfaite.
Et si aujourd’hui, vous avez de l’électricité chez vous, si vous pouvez communiquer par INTERNET, si vous pouvez vous déplacer
en voiture, si vous pouvez manger pour pas cher dans un MAC-DO et si vos parents peuvent vous acheter les dernières baskets
à la mode, c’est bien parce que, depuis un siècle, tout le monde a pensé économique, a pensé développement, a pensé, malheureusement trop souvent, financier. Alors, PARDON de ne pas avoir pensé à la nature.
Parce que cette nature si merveilleuse, si puissante et si indispensable à l’homme, nous l’avons oubliée, totalement oubliée, volontairement oubliée.
Pour développer l’économie, nous avons dit aux industriels et aux agriculteurs :
« Creusez la terre, pour avoir la matière première et servez vous de la terre pour produire ; ce n’est pas grave, la terre est immense.
Coupez les arbres, pour avoir le bois ; les arbres, ça repousse.
Prenez de l’air, si vous en avez besoin ; l’air se renouvelle constamment.
Et Prenez de l’eau ; on en a plein ; de toute façon, elle vient du ciel. »
Et maintenant, alors que nous devons vous léguer cette terre, nous nous apercevons que la planète n’est pas immense, que les arbres ne poussent pas vite, que l’air peut être une denrée précieuse et que l’eau, quand on en a, est bien souvent polluée.
Alors, PARDON de tout ce que nous avons fait, mais les intentions étaient bonnes et la méthode était imparfaite.
Maintenant, il nous faut réparer ;
- Pas pour se donner bonne conscience
- Pas pour se faire pardonner
Non, simplement pour être un vrai citoyen ou, simplement, pour être un habitant de la terre.
Car la vie d’un homme, d’un citoyen ou n’importe quel être vivant sur la terre, ne peut et ne doit être consacrée qu’à une chose : Préparer l’avenir.
Aujourd’hui, vous avez, sans doute entendu parler de Développement durable. Cette nouvelle notion permet d’allier 2 idées : Développer l’économie, parce que l’homme en a besoin et penser à l’avenir, en respectant notre environnement, notre nature.
Nous voulons pouvoir vous dire, dans quelques années :
« Le portable que tu as, c’est un progrès formidable ; mais nous n’avons pas, forcément pillé la nature, pour le fabriquer »
« Le cahier que tu utilises à l’école, c’est pratique ; mais nous n’avons pas, forcément abattu des milliers d’arbres, en AMAZONIE, pour te le fabriquer « » L’eau que tu bois, elle est bonne et nous n’avons pas eu besoin d’y ajouter des tas de produits chimiques ; elle est pure et elle vient du ciel ».
Mais pour en arriver à ce stade là, il faut que tout le monde fasse un effort :
- Nous, les adultes, en changeant notre façon de penser, de gérer et de faire du développement.
- Et vous, les enfants, en entrant dans ce monde en étant intimement persuadés qu’il n’y a pas de vie possible quand il n’y a pas d’eau, qu’il ne peut pas exister d’être vivant s’il n’y a pas d’eau et qu’il n’y a plus d’avenir possible, s’il n’y a plus d’eau.
- Et n’oubliez pas que plus de 1 milliard d’hommes n’a pas accès à l’eau et que, chaque jour, 9000 enfants, dans le monde meurent parce qu’ils ont bu de l’eau polluée.
Alors, économiser l’eau, protéger l’eau, réparer l’eau…..ce n’est pas être un rêveur, c’est simplement avoir conscience que chaque geste de la vie quotidienne doit être porteur d’une volonté, volonté de sauver ces fleurs qui poussent dans vos jardins, volonté de sauver ces animaux que vous voyez courir dans les forêts, volonté de sauver l’homme parce que, plus que tout être au monde, l’homme ne peut pas vivre sans eau.
Au début de mon intervention, je vous ai demandé PARDON des bêtises que nous avons faites. Nous allons essayer de redonner à notre développement, un peu de conscience ; nous allons tout faire pour vous transmettre un monde plus vrai, un monde plus pur. Et après, ce sera à vous d’être responsables ; mais rappelez-vous, même si la nature est très puissante, elle ne peut pas tout réparer.
J’espère, qu’au cours de cette journée, vous aurez appris quelque chose ; j’espère qu’au cours de cette journée vous aurez, un peu, réalisé combien il est important de respecter, de protéger et de vivre, en harmonie, avec l’eau et avec la nature.
Certains diront, ce soir, que tout ceci n’est qu’illusions, rêves ou utopies.
- Mais s’il n’y avait pas l’Espoir et l’Utopie…Comment pourrait-on être parents
- Et s’il n’y avait pas la Conviction et l’Utopie, Comment pourrait-on être enseignant
- Et s’il n’y avait pas le Rêve et l’Utopie, vous ne seriez plus des enfants.
Le monde vous appartient déjà ; respectez le car il a besoin de vous ; protégez le car vous avez besoin de lui…..et si, dans quelques années, les vieux grands-pères et vieilles grands-mères que nous seront devenus, s’aperçoivent, qu’enfin, l’homme est à sa place, dans une nature sauvegardée, nous saurons que la bataille a été gagnée et nous serons heureux, car nous saurons, qu’indirectement, vous nous avez pardonné.
Permettez-moi, avant de terminer, de remercier tous les participants à cette journée, qui est une première :
- Merci aux enseignants, pour ce que vous faites et ce que vous ferez. Pour faire passer le message, nous avons besoin de vous.
- Merci à Madame Le Recteur de l’Académie d’AMIENS et à Monsieur le Recteur de l’Académie de LILLE, ainsi qu’aux services des inspections académiques du Nord-Pas-de-Calais, de la Somme et de l’Aisne. L’éducation nationale est, par essence même, l’outil qui nous permettra d’influer sur l’avenir.
- Merci aux différents intervenants. Je n’ai pas pu assister au déroulement de toute la journée, mais je suis sur que nous avons tous été dans le même sens
- Merci à Cité Nature qui a accueilli ce premier colloque
- Merci enfin à vous, les enfants. Merci d’être venus, merci de vous être intéressés à l’eau et, surtout, merci de ce que vous ferez
Nous, les adultes, nous préparons le terrain, mais ce sera, bientôt, à vous de jouer. Alors, mes jeunes amis, comme il est dit, dans la Guerre des Etoiles :
« Que la force soit avec vous ! »
Merci à vous tous et rentrez bien chez vous.
/ Hervé Poher