La Waast, Journée sur les mares.
M/M/M
C’est à moi que revient ce privilège rare, mais dont je suis pleinement conscient, de lancer cette journée de travail sur les mares.
Si on m’a demandé de dire le mot d’accueil,
- Ce n’est pas parce que je suis vice-président du Conseil Général chargé de l’environnement : cela ne me confère pas de légitimité indiscutable.
- Ce n’est pas parce que je suis le président d’Eden 62 : cela ne me transforme pas, automatiquement, en spécialiste.
- Ce n’est pas parce que je suis membre du parc ; cela ne me donne pas, pour l’instant, une expérience remarquable dans ce domaine, expérience qui pourrait vous être utile.
Non, si j’ai accepté de lancer cette journée, c’est parce qu’avant tout, j’ai l’honneur de présider le Comité de Bassin de l’agence de l’Eau Artois-Picardie.
Pour être franc avec vous, le Président d’un Comité de Bassin, n’a pas un pouvoir énorme : il est là pour fixer, au sein du Comité et en concordance avec l’Agence de l’Eau, les grandes orientations philosophiques qui se retrouvent transcrites dans les programmes de l’Agence. Mais le rôle d’un président de Comité de Bassin est essentiel dans un domaine : Il doit être un apôtre de l’eau ; il doit porter la bonne parole ; il doit essayer de faire passer les idées.
C’est pourquoi j’ai accepté de venir lancer cette journée. Et ce n’est pas l’élu local ou départemental qui vous parle, c’est l’apôtre de l’eau. Et ma présence, toute symbolique se veut porteuse d’un message simple : les mares et les zones humides en général, doivent faire partie de nos préoccupations, de nos raisonnements et de nos objectifs d’aménagement du territoire.
Et si je dis cela, ce n’est pas par effet de mode ; ce n’est pas parce que parce que les termes « zones humides » font partie d’une certaine pensée unique, intégrée dans le concept de développement durable ; Non, si je dis cela c’est que les zones humides doivent faire l’objet d’une attention particulière.
- Parce que les aménageurs du territoire que nous essayons d’être ne peuvent pas être efficaces si nous n’intégrons pas l’eau, d’où vient l’eau, où va l’eau, comment circule l’eau.
- Parce que les dépositaires de la nature que nous sommes, ne peuvent pas ignorer que l’eau et les zones humides sont sources incontournables de création et de maintien de la biodiversité.
- Parce que les responsables que nous sommes ne peuvent oublier le rôle que peuvent jouer les zones humides au niveau agricole, touristique, culturels et socio-économique.
- Parce qu’il serait illusoire de vouloir réparer notre environnement sans intégrer l’urgence d’avoir une politique volontariste dans le domaine des zones humides.
Oui, j’ai bien dit : réparer. Car c’est là qu’est le vrai problème : dans la disparition des zones humides, notre société a beaucoup fauté. Les raisons en sont multiples, souvent explicables, parfois excusables. Mais le but de la sensibilisation, l’objectif de la prise de conscience, c’est ne pas refaire les mêmes bêtises ; c’est de faire prendre conscience aux décideurs et aux citoyens qu’il n’est jamais trop tard pour réparer. Et s’il était trop tard, nous ne serions pas réunis, ici, pour cette journée.
Et cette journée, le 2 Février de chaque année, c’est la Journée Mondiale des Zones Humides. Certains pourraient trouver bizarre qu’on fasse une journée mondiale sur un tel thème : Mais c’est la preuve même que cette cause doit être considérée comme une priorité mondiale. Quand on créé une journée mondiale ou nationale, c’est toujours pour sauver quelque chose ou pour lutter contre un fléau. Par exemple, vous avez la journée sans tabac…. Sans commentaires ! Par contre, je me pose la question : on a créé la journée de la femme ! Est-ce pour sauvegarder une race en voie de disparition ou est-ce pour dénoncer un fléau ?
Vous le savez, sans doute, le 2 Février est l’anniversaire de la convention de RAMSAR, traité international qui engage les signataires dans une démarche de conservation et d’utilisation rationnelle des zones humides et de leurs ressources. La France s’est engagé dans ce processus en 1986, 20 ans déjà. La France a désigné 23 sites sur son territoire métropolitain et 3 en outre-mer. Le plus proche de nous est la baie de Somme ; les plus illustres sont la Camargue et la baie du Mont St Michel.
Ici, vous êtes dans la Parc des Caps et Marais d’Opale. Et ce nom dit bien ce qu’il veut dire : On y cite les Caps, parce que le site des 2 Caps est une de nos fierté et on y cite les marais, parce que les marais sont une de nos richesses, même si, il faut l’avouer, ce trésor a diminué au fil des siècles.
Dans ce parc, vous avez quelques zones humides remarquables : Le marais de l’Audomarois, Le marais de Guînes, et ceux de la Slack et de Tardinghen. Sur les 2 plus grands, en particulier, les collectivités ont été très volontaristes en créant des zones de préemption ou en étant propriétaire et gestionnaire. Avec une seule philosophie : le maintien et la préservation de ces zones. Mais outre ces marais remarquables, nous avons, sur le territoire une multitude de mares, bien souvent créées par l’homme et qui n’existent que grâce à l’homme. C’est aussi un atout et nous devons tout faire pour continuer dans cette voie. Malgré les difficultés.
Et permettez-moi, pour terminer, de vous illustrer les difficultés que nous avons parfois, dans ce domaine.
La CCTP, dont je suis le président, a subi, fin 2000, des gros problèmes d’inondation avec coulées de boue, ravinement des sols et montée des eaux dans des zones de marais….. Où habitent des gens. Voulant attaquer le problème à la source, la CC a inventé l’Opération ARARAT : 12 kms de haies, 10 kms de bandes enherbées, des diguettes, la réfection des fossés…. Tout cela s’est fait, en accord avec le monde agricole, parce que la CC mettait de l’argent sur la table. Mais, notre belle et ambitieuse opération ARARAT comprenait aussi plus de 20 mares. Et ces mares avaient un statut spécial. C’était des sortes de bassins de rétention. Mais les bassins de rétention ne sont pas subventionnés ; par contre, les mares le sont. Et comme, à certains endroits, vous étiez incapables de dire si c’était un bassin de rétention ou une mare, nous avons inventé le concept de mare de rétention.
Le bilan de l’Opération ARARAT est celui-ci : nous avons fait nos bandes enherbées, nos haies, nos diguettes…. Nombre de mares : zéro. Les discussions avec certains agriculteurs qui nous mettaient des conditions insupportables pour une collectivité, ont fait que nous avons dû renoncer à ces réalisations indispensables. Et en tant qu’élu responsable, je le regrette. C’était un élément essentiel de notre intervention ; c’était un plus pour l’aménagement du territoire ; c’était un plus pour la biodiversité ; et c’était un plus pour le confort et la sécurité nos concitoyens. Comme quoi le civisme et la bonne volonté de certains se heurtent parfois à certains intérêts particuliers qui bloquent la machine.
Voilà ce que je voulais vous dire en introduction.
Les parcs sont, intrinsèquement, des territoires d’expériences et d’exemplarité. Permettez-moi de dire que je souhaite que dans le domaine des zones humides, chaque région, chaque département, chaque commune puissent être un lieu d’exemplarité. C’est le minimum que nous puissions faire pour la nature, pour notre environnement et pour les enfants…. Qui depuis la nuit des temps sont toujours attirés par les mares, les tritons, les grenouilles et j’en passe.
M et M, bon courage pour cette journée de labeur et soyez, chacun de vous, porteur de la bonne parole. C’est le président du Comité de Bassin qui vous le demande. Et si la prochaine fois que je vous rencontre, vous me dites « Y’en a marre », je ne prendrai pas cela comme une injure mais bien comme un signe positif.
Hervé Poher