Histoire d’une exclusion….
ACTE I : 29/11/2010 : Déclaration de Liévin ( Conseil fédéral du PS)
Après l’annonce de la liste sénatoriale pour 2011….
Mes chers camarades
Catherine. Tu as dit que l’élaboration de cette liste avait été un vrai casse-tête. Je suis désolé de te donner des migraines mais, maintenant, il y a de bons traitements contre cela.
Je voulais simplement vous expliquer, à vous tous, mes chers camarades, pourquoi j’ai déposé ma candidature, pourquoi ai-je fais cela ? Qu’allais-je faire dans cette galère ?... Et je me suis même posé la question.
Si j’ai déposé ma candidature, ce n’est pas contre quelqu’un, mais pour quelque chose. Et ce n’est pas contre Daniel Percheron et Michel Sergent. J’ai trop de fidélité, d’amitié et de respect pour vous. Et toi, Michel, un peu plus encore car je n’oublierai jamais ce jour de 1996, où je me suis trouvé presque seul pour défendre un dossier d’intercommunalité. J’en ai pris plein la tête et mes camarades socialistes étaient fort peu nombreux. Il y avait toi, Jean-Claude et encore un autre… J’avoue que j’ai une dette envers toi.
Mais si j’ai posé ma candidature, c’est que je ne pouvais pas faire autrement. Et cela pour plusieurs raisons.
Tout d’abord : J’aimerais bien faire mentir l’histoire.
Suppléant de Dominique DUPILET en 1997, redésigné par les militants en 2001, j’aurais dû normalement lui succéder. C’était la logique. Mais la logique s’est arrêtée le mardi 16 avril 2002, à 11h20, rue de Solferino, quand j’ai dit à François Hollande « OK pour aider Jack Lang, à s’implanter dans le Pas-de-Calais ». Mais, vous le savez, le calcul était bon : au mois d’avril, tout le monde était persuadé que Lionel Jospin allait être président de la République. Lionel président ; Jack ministre ; Hervé député.
Patatra ! Vous savez ce qui est arrivé. Je me suis dit : « Le parti ne m’oubliera pas et, à l’extrême, j’attendrai cinq ans. ». En 2007, on m’a fait comprendre que Jack devait rester. « C’est pas grave, le parti pensera à moi et j’attendrai encore 5 ans. C’est bon pour 2012.»
Patatra ! Redécoupage électoral ! La 3ème disparait ; la 6ème est redécoupée. Jean-Claude Leroy n’a plus de circonscription… Inutile de vous dire que nous avons eu des états d’âme, que les questions se sont posées mais moralement, affectivement et intellectuellement, je n’avais pas le choix : Jean-Claude peut se présenter dans la 6ème ; et si Jean-Claude se présente, moi, je dois me retirer. Je n’ai pas le choix, c’est une question d’honneur.
Voilà pourquoi je dis que je voulais faire mentir l’histoire. Je ne vais pas rester toujours à coté du train. J’ai aussi le droit à un destin. Et puisque je ne peux pas être député, autant être sénateur.
Autre raison. J’ai été 12 ans maire et je pense ne pas avoir été un mauvais maire. Pourquoi 12 ans ? Parce qu’en 95, j’avais promis de ne faire que 2 mandats. J’ai tenu parole et j’ai installé mon successeur.
J’ai créé et je suis président d’une communauté de communes qui est un peu spéciale car c’est surtout un beau laboratoire d’idées et d’expériences. Nous y avons créé plein de choses. Mes collègues du Conseil Général ne me diront pas le contraire.
Je suis VP du Conseil Général et j’ai la faiblesse de croire que je fais bien mon travail, même si ma façon de faire énerve certains.
Et enfin, je suis président du comité de bassin de l’agence de l’eau et je vous rappelle que j’ai été le premier président de gauche d’un comité de bassin en France.
Tout cela pour dire que j’ai une certaine expérience du fonctionnement des collectivités et des grands dossiers, expérience que je pourrais mettre au service du PS et valoriser au Sénat.
Autre raison et permettez-moi de taquiner notre parti. Car je sais lire. On parle de renouvellement, de laisser la place aux autres… En me présentant, je vous propose de renouveler les sénateurs… et ainsi je libérerais un poste d’adjoint au maire, puisque le poste de maire je l’ai déjà donné, un poste de président de CC, un poste au CG et même de VP, un poste de suppléant député, voire de candidat titulaire et même un poste de président du comité de bassin de l’agence de l’eau. Je ne peux pas faire plus !
Dernière raison, pour détendre l’atmosphère. Cela fait 20 ans que je fais de la politique et cela fait 20 ans qu’on m’appelle Alain Poher… Quitte à avoir le prénom, j’aimerais bien en avoir le titre.
Voilà pourquoi j’ai déposé ma candidature… Car je ne pouvais pas faire autrement !
Avec un handicap que je veux bien avouer: Intellectuellement, je suis souple comme une barre de fer…
C'est-à-dire que vous ne me ferez pas dire que c’est rose si c’est bleu, que j’ai tort si je suis sûr d’avoir raison et comme en plus, je suis provocateur et foncièrement indiscipliné, sachez que, systématiquement, si on m’ordonne de voter Durand, je voterai Dupont !
Ce qui veut dire que je me suis fait, dans cette fédération et dans ce département, un certain nombre d’inimitiés que j’assume entièrement.
Voilà ce que je voulais vous dire. Et je terminerais par 2 derniers points.
J’ai appris, il y a une heure, que je serai 5ème sur la liste. Mais ce n’est pas 5ème que je voulais être, c’est premier… Je dis cela pour rire, bien entendu ! Plus sérieusement. Je prends cela comme une marque de confiance et un honneur. Mais je serai franc et clair avec vous. Je mets cette place à disposition du parti… Catherine, si cela peut arranger les choses, effacer certaines rancœurs ou si Michel change d’avis… Je ne serai pas vexé.
Par contre, je tiens à te prévenir Catherine et vous tous, membres du conseil fédéral. Nous allons valider la liste le 2 décembre : le 2 décembre, c’est l’anniversaire du couronnement de Napoléon 1er, l’anniversaire d’Austerlitz et l’anniversaire du coup d’état de Louis-Napoléon Bonaparte… Alors le 2 décembre 2010, ce sera aussi le coup d’état d’Hervé Poher: car ce soir là, quand je serai sûr que Jean-Claude Leroy va être sénateur, j’annoncerai que le candidat dans la 6ème, c’est moi… Parité ou non, parti ou non ! Je serai candidat en 2012. Je ne sais pas si je serai élu mais au moins, j’aurais été jusqu’au bout de mon chemin. HP
ACTE II : 11/ 2011 /Lettre de Hervé Poher à François Hollande
Monsieur François Hollande, Cher camarade, Cher ami.
Elu de la 6ème circonscription du Pas-de-Calais, j’ai accepté, en 2002, d’aider Monsieur Jack Lang à s’implanter dans notre département : je retirais ma candidature et j’acceptais d’être son suppléant.
Dix ans après, c’est-à-dire dernièrement, j’ai annoncé officiellement que je serai candidat pour les prochaines législatives. Je pense, en effet, avoir certaines légitimités à revendiquer ce droit, d’autant que le 10 avril 2002, vous m’aviez vous-même, lors d’un entretien rue de Solferino, affirmé que « le Parti Socialiste saurait me renvoyer l’ascenseur.
Je suis persuadé que vous pouvez comprendre ma démarche, basée sur un travail de terrain, permanent depuis plus de 20 ans au nom du Parti Socialiste.
Recevez, mon cher camarade et ami, l’expression de mes sentiments les plus respectueux. HP
ACTE III : 01/12/2011 : Vote des militants pour le choix du candidat
Poher : 337 voix
Bourguignon : 193 voix
Rembotte : 153 voix
Jack Lang a retiré sa candidature la veille au soir.
ACTE IV : 12/12/2011 : Lettre de Hervé Poher à Madame Catherine Génisson
Madame la Première Secrétaire Fédérale.
Par honnêteté, respect et amitié, je me devais de vous faire parvenir cette lettre.
Vous le savez, nous avons décidé, Alain Méquignon et moi-même, de maintenir notre candidature pour les législatives 2012 ; maintenir car il nous est insupportable d’admettre que l’investiture de notre candidate officielle soit basée sur un tour de passe-passe, sur une manipulation et sur un mensonge.
Tour de passe-passe quand le secrétariat fédéral a validé le changement des règles de vote : un vote séparé pour les hommes, un vote séparé pour les femmes, Jack contre Hervé, Brigitte contre Dominique. Vous avez refusé un vote général car le résultat était acquis et peu « transformable »… Mais Alain et moi, sûrs de notre légitimité, nous avons accepté d’aller au bout de ce processus… D’ailleurs, on ne nous a pas demandé notre avis et comme nous n’avions rien à craindre… cette circonscription n’étant pas et n’ayant jamais été réservée à la parité ! C’est normal, Jack était sortant et candidat…
Le secrétariat a décidé d’orienter le processus électoral et personne n’a eu le courage et l’amitié de nous prévenir… Quelle marque de dédain envers nous !
Manipulation car, pour ce vote, les dés étaient pipés et cela avait été fait volontairement. La démarche définie en Secrétariat Fédéral peut être résumée en « Tout sauf Poher ». Et je reconnais là la formation et la marque de certains « camarades ».
En effet :
· Si Jack gagnait l’élection interne, personne ne pouvait contester sa légitimité… « Vous avez voulu un vote, vous l’avez eu ! »… Donc pas de Poher !
· Si Jack perdait, vous sortiez la parité de votre poche et vous proposiez une femme… « C’est le national qui exige ! »… Donc pas de Poher !
· Jack vous a facilité les choses en ayant peur et en ne se présentant pas… « En plus, un plébiscite pour un seul candidat homme n’a plus de valeur…»
Et, dans cette logique, que vous avez osé dire, en Convention Fédérale, après le vote et malgré le vote, que pour la 6ème la fédération allait proposer une femme. Ce qui n’avait jamais été dit, ni même jamais évoqué en Conseil Fédéral, encore moins devant les sections ! Les circonscriptions réservées aux femmes avaient toujours été la 1ère, la 2ème, la 9ème. Des centaines de militants en sont témoins.
Il semble évident qu’il a été décidé, bien avant le vote, de manipuler le résultat et personne n’a eu l’honnêteté et l’amitié de nous prévenir et, au final, quel mépris pour les militants !
Mensonge enfin, car depuis samedi, nous avons compris que la copie rendue au National, par la Fédération, était fausse ou tellement orientée qu’elle en devenait fausse. Madame Bourguignon y est présentée comme « grande gagnante de la consultation militante !!! » Dois-je vous rappeler le résultat de ce vote ?
ü POHER : 337 voix
ü BOURGUIGNON : 193 voix
ü REMBOTTE : 153 voix
Et elle a gagné ??!! C’est ce que j’appelle de la « démocratie orientée, voire dirigée pour ne pas dire falsifiée » !
Passe-passe, manipulation et mensonge… Trois pratiques qui nous obligent, Alain et moi, à montrer qu’il existe d’autres méthodes, d’autres valeurs et, peut-être, d’autres légitimités. Et de poser la question : « Pourquoi la 6ème circonscription est-elle la seule circonscription où le vote militant n’a pas été respecté ? »
Soyez assurée, Madame la Première Secrétaire, que nous sommes désolés de devoir en arriver là, mais il y a des dires et des attitudes qui sont blessantes, inexplicables et injustes donc inacceptables. Et vous le savez, les blessures d’honneur sont toujours les plus dures à guérir.
L’honneur est peut-être la seule chose qui, à terme, nous restera, mais au moins, de façon démodée, nous serons fiers d’avoir su le garder.
Je sais que nous avons certainement tort de mettre de l’honneur, de l’honnêteté et de l’amitié là où ces mots ne représentent plus rien, mais on ne se refait pas !
A coté, en marge ou exclus du Parti, nous vous laissons le choix de notre nouveau statut. Nous nous y plierons, respectueux car honnêtes, malheureux mais obligés.
Recevez, Madame la Première Secrétaire, l’expression de nos salutations. HP
ACTE V : 14/02/2012 Lettre du PS à Hervé Poher
Cher camarade.
Le bureau national du Parti, réuni ce mardi 14 février 2012, a pris acte de ton intention exprimée publiquement à plusieurs reprises, d’être candidat dans la 6ème circonscription du Pas-de-Calais.
Comme tu le sais, la Convention Nationale de ratification des candidatures socialistes aux élections législatives de juin 2012 a investi notre camarade Brigitte Bourguignon comme candidate dans cette circonscription. Cette décision est conforme à l’objectif de parité fixé par le Parti dans ce département.
Ta démarche est contraire aux objectifs politiques du Parti Socialiste. Elle est de nature à entrainer la confusion dans l’esprit des électeurs, en pleine campagne présidentielle. Le bureau national a donc souhaité, à l’unanimité, que tu prennes publiquement l’engagement de renoncer à toute candidature, de manière à dissiper tout malentendu, d’ici lundi 27 février 2012.
Si tel n’était pas le cas, nous nous verrions dans l’obligation de soumettre au Bureau National du mardi 28 février 2012 ta demande d’exclusion, conformément aux termes de l’article 11.19 de nos statuts
Ne souhaitant évidemment pas en arriver à cette extrémité et comptant sur ta compréhension, nous te prions de croire, Cher camarade, à l’assurance de nos sentiments socialistes les meilleurs. FL
ACTE VI : 21/02/2012 : Réponse de Hervé Poher au PS
Monsieur le Secrétaire National.
J’accuse réception de votre courrier, daté du 14 février, courrier se rapportant au problème des élections législatives dans la 6ème circonscription du Pas-de-Calais.
Permettez-moi de vous faire part de mon incompréhension. En effet, faisant suite à la directive fédérale (datée du 1er février) ainsi qu’à la réunion de concertation (le 10 février) avec Catherine Génisson, Première Fédérale de notre département, tout le monde était tombé d’accord sur le fait que la seule et vraie priorité était la campagne pour et avec notre candidat François Hollande. Et c’est dans cet esprit, cette optique et cette perspective que nous, responsables, élus et secrétaires de section, nous nous sommes positionnés… Et c’est pour porter cette ambition que nos militants sont déjà prêts à être mobilisés dès qu’on fera appel à eux. Et pour nous tous, un seul but : la victoire de François !
Dans une circonscription redécoupée, avec sept cantons ruraux, avec plus de 150 communes, nous avons un challenge à relever mais l’ensemble des socialistes sait que ce challenge est à portée de main… Nous en sommes tous parfaitement conscients et moi, connaissant bien ce territoire, j’en suis conscient peut-être plus encore que les autres. Et, croyez-moi, Monsieur le Secrétaire National, ma formation personnelle fait que je sais ne pas me tromper d’urgence.
Et c’est à la lumière des résultats de François dans cette circonscription que nous serons capables de déterminer quelles sont nos atouts pour les législatives. Mais d’ici là, nous ne devons pas nous tromper d’adversaire.
Bien entendu, je me tiens à votre disposition pour vous préciser, s’il en était besoin, l’état d’esprit qui est le nôtre.
Recevez, Monsieur Le Secrétaire National, l’expression de mes salutations distinguées. HP
ACTE VII : 23/04/2012 SMS de François Lamy, secrétaire national
« … Tu renonces avant demain soir ou tu es exclu… »
Acte VIII : 24/04/2012 Réponse de Hervé Poher à François Lamy
« Lors même qu’on n’est pas le chêne ou le tilleul
Ne pas monter bien haut, peut-être, mais tout seul. »
Désolé HP
ACTE IX : 27/04/2012 Martine Aubry annonce, à Lumbres…
« Qu’Hervé Poher et Alain Méquignon sont exclus du Parti depuis mardi soir. »
FIN