Permettez-moi d’évoquer un thème qui m’est cher, en ce moment.
Allez savoir pourquoi ! Il y a des périodes où on a besoin de lancer des messages…
Et ce thème, c’est ceci : « Vous les décideurs, vous les responsables, vous les politiques : n’oubliez jamais que les gens veulent qu’on leur raconte une histoire, gaie ou triste, héroïque ou banale. Peu importe. Ils veulent qu’on leur raconte une histoire. Et si vous ne le faites pas, ils écrivent l’histoire eux-mêmes et le résultat est parfois peu plaisant… »
Alors, mesdames et messieurs, ce matin, je vais vous raconter 2 histoires.
La première pourrait s’appeler : « A cœur vaillant, rien d’impossible. » Et la seconde « Si j’avais su, j’aurais pas venu ! »
La première, « A cœur vaillant, rien d’impossible. » est l’histoire d’un blanc-bec… Et quand je dis blanc-bec, ce n’est pas péjoratif. Un blanc-bec, c’est une personne qui croit que tout est possible, qu’il suffit de vouloir, que la dynamique va tout emporter, qu’on peut tout réussir…
Bref, ce blanc-bec voulait devenir maire de Guînes, conseiller général et Président de la république. C’était en 1994.
Et pour réussir tout cela, il fallait un programme. Ce qu’il fit. Et dans ce programme, il y avait « la mise en place d’une piste cyclable entre Guînes et Coulogne ». Cela semblait tellement facile ; il suffisait d’aménager le chemin de halage qui va de Guînes à Coulogne.
Le sort des urnes ayant été positif, je convoque… Ou plutôt, j’invite le directeur de Voies Navigables de France et je lui expose mon projet. Le directeur m’écoute gentiment et, à la fin me dit : « Monsieur le Maire, ce n’est pas aussi simple que cela…. Nous, nous ne sommes propriétaires de rien.» Je m’étonne et dis « Mais qui est propriétaire ? »
Il me répond : « C’est très compliqué mais je vais vous expliquer. VNF est propriétaire des berges jusqu’au haut du bourrelet, seulement la moitié du bourrelet. Le reste et le chemin de halage, c’est la propriété de l’Etat… Depuis Louis-Philippe. Mais comme l’Etat ne pouvait pas s’occuper de tous ces chemins, il les a confiés à d’autres structures ; ici, le chemin a été confié aux sections de wateringues. Mais comme ces sections de wateringues n’avaient pas d’argent, elles ont demandé aux communes de les entretenir.
Donc propriété de l’Etat, confiée aux wateringues mais entretenue par les communes… C’est déjà compliqué… Mais ce n’est pas tout. Au fil des années, des maisons se sont construites, le long du chemin de halage, et les notaires ont vendu… Ou c’est une erreur de cadastre… Bref, des gens sont propriétaires d’une partie du chemin… Quelques fois même jusqu’au canal !»
Alors, en partant, le directeur de VNF m’a dit : « Monsieur le Maire, si vous arrivez à sortir de cette affaire-là, je vous paye le champagne ! »
« A cœur vaillant, rien d’impossible ». Je confie ce dossier au Conseil Général… C’était en 1995, 1996… Nous sommes en 2015… Et nous venons d’inaugurer… Comme quoi ce n’était pas si simple…
Et pendant des années, il y a eu un rituel, au Conseil Général : quand en commission, nous parlions des vélo routes et des pistes cyclables, tous les techniciens levaient les yeux et regardaient le plafond en attendant que j’énonce ma question habituelle : « Et ma piste cyclable… Elle en est où ? »
Vous voyez, cela a été long… 21 ans moins 5 semaines… Mais on y est arrivé. Vous avez peut-être vu que cela a couté 2 millions d’Euros au Conseil Général, 1,6 million pour le Conseil Général et 400 000 Euros par l’Europe…
Certains diront que « Ça fait cher ». Pas trop : c’est à peine plus que 2 ronds-points… Car nous, au Conseil Général, c’est notre échelle de mesure : le rond-point. Certains parlent encore en ancien franc ; d’autres en nouveau franc ; d’autres en euros ; nous, on parle ne rond-point… Un rond-point égal 1 million d’euros !
Enfin merci au Conseil Général de m’avoir permis de tenir une de mes promesses électorales.
Seconde histoire. Le parking du centre-ville. C’est à peu près à la même période.
Là, le problème était simple. L’équipe municipale avait trouvé que la place de Guînes était trop chargée en voitures. De plus, elle a un aspect un peu trop minéral. Il fallait donc faire un aménagement et trouver un parking ailleurs… derrière la mairie.
Donc, 3 parties à ce dossier
1) Modifier la place
2) Créer un parking derrière la mairie
3) Faire un passage pour que les gens puissent aller du parking à la place.
Pour la première partie, il fallait revoir l’aménagement de la place et, en particulier, bouger le monument aux morts. Evidemment, cette nouvelle a « fuité » dans la commune. Et le maire a été accusé d’oublier les anciens combattants, de ne pas respecter le passé…
Malgré cela, j’ai dit : « On va jusqu’au bout de la démarche. » Nous avons donc demandé un devis à une entreprise locale. Et l’entreprise est venue me dire : « Monsieur le Maire. On fait ce que vous voulez mais je vous préviens, dès qu’on touche au monument, il tombe en petits morceaux… » OK… On a laissé tomber le dossier.
Ensuite, il fallait faire une nouvelle mairie avec un passage pour les gens. C’est ce que nous avons fait en mettant un porche à la nouvelle mairie. Mais nous n’avions jamais imaginé que la maison d’à côté allait s’effondrer… heureusement sans faire de blessé !!! Si bien qu’il y a maintenant 2 passages.
Dernière chose. C’est que pour aménager un parking, il faut être propriétaire du terrain. Et nous ne l’étions pas. Et en 12 ans, je n’ai jamais réussi à être propriétaire. C’est à croire que pour madame Pilon, le charme de Marc a été plus efficace que le mien.
Là aussi, le Conseil Général est intervenu avec une somme de 40 000 Euros. Dans le cadre du FARDA… C’est logique et normal car cet aménagement entre dans la démarche développement durable.
Bref, le parking est fait et j’en suis heureux. Merci au Conseil Général et à la mairie qui, dans ces deux dossiers m’ont aidé à remplir mes engagements… Ce n’était pas obligatoire et j’ai souvent entendu, au Conseil Général, cette phrase : « Les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent. » Mais moi, j’aime bien tenir mes promesses. Surtout avant que le rideau ne tombe.
Tout cela pour vous dire que le développement durable, c’est dur à faire entrer dans les têtes… Et ces deux dossiers étaient du développement durable. Et on avait en plus une éolienne à l’entrée de la commune… Permettez-moi de regretter la disparition de cette éolienne… Une éolienne à l’entrée d’une commune du Parc, Parc qui vient d’être retenu comme Territoire à Energie Positive, cela faisait bien !
Tout cela pour vous dire que la gestion communale, ce n’est pas si simple que cela.
Merci enfin. Car vous avez fait plaisir à mon épouse. Depuis des années, elle dit qu’elle veut aller travailler en vélo… Maintenant que l’hôpital a été déplacé et que la piste cyclable est inaugurée, elle va pouvoir enfin faire ce qu’elle a dit.
Merci pour elle.
Hervé Poher