« Les libertés individuelles sont une urne sacrée en France »
Le congrès s’est réuni lundi soir. François Hollande a annoncé les mesures qui seront prises suite aux attentats de vendredi. La réaction d’Hervé Poher, sénateur
Comment s’est passé le congrès?
Hervé Poher, sénateur : « C’était un moment émouvant, mobilisateur et unitaire. Dans ces cas-là, on peut hésiter entre la compassion et l’esprit de combat. C’est l’esprit de combat qui a été choisi. Tous les partis ont dit qu’ils étaient derrière le président. Personne ne dirait que le président à tort. Ce serait mal vu par 99% de la population en ces temps de guerre. »
L’union nationale a pourtant l’air précaire...
HP : « Elle peut paraître précaire mais on reste en campagne des régionales et pré-présidentielle. C’est la règle du jeu de la politique et c’est aussi ce qui est un peu malsain.»
Que pensez-vous des mesures annoncées ?
HP : « L’ensemble des mesures sont de bonnes mesures. Honnêtement, on peut dire que ça ne va pas assez loin, mais dès qu’on touche aux libertés individuelles, c’est la levée de boucliers. La difficulté en France, c’est qu’on est très tatillon sur nos libertés et sur l’état de droit. Les libertés individuelles sont une urne sacrée en France, même pour nous sénateurs. Lorsque Bernard Cazeneuve a présenté il y a quelques mois des mesures de surveillance pour internet, on l’a titillé sur nos libertés individuelles. Même moi, je pensais que c’était exagéré. Nous sommes aujourd’hui passés à un état en guerre et à une économie de combat. En état de guerre, il y a des choses qu’on autorise et qu’on doit accepter. Ceux qui n’ont rien à se reprocher n’ont rien à craindre. »
On peut aussi avoir l’impression que l’on n’a pas pris les mesures qui s’imposaient après les attentats de janvier, ou pas assez rapidement.
HP : « Depuis le mois de janvier, il y a plus de sécurité avec plus de militaires. Et en janvier, les financiers ont peut-être pris le dessus. Il est aussi évident que si des gens veulent faire des attentats comme ils l’ont fait, ils ont des chances d’y arriver malgré tout ce qu’on peut mettre en œuvre. Le terrorisme est quelque chose d’impalpable, d’invisible. C’est ce qui est dramatique, c’est n’importe où, n’importe quand, avec n’importe qui. »
Il y a aussi la question des moyens. Plus de forces de l’ordre ou de surveillance, cela demande des moyens humains et financiers qui ne sont pas forcément mobilisables en quelques jours...
HP : « Le problème en France, c’est que c’est Bercy qui dirige. C’est toujours la question du financement ou du budget qui est en ligne de mire. Aujourd’hui, le pacte de sûreté est supérieur au pacte de stabilité. On sera dans le rouge au niveau budgétaire pour rassurer la population et assurer la sécurité. Il faut arrêter que ce soit les financiers qui gèrent la France. La gestion du pays et du peuple, ce ne sont pas uniquement des chiffres. Il faut des mots, des idées. Il faut pouvoir raconter des histoires, belles ou tristes, réalistes ou pas. On ne parle plus que de gestions, d’impôts, de déficits. Il ne faut pas s’étonner du vote FN. Les gens sont dégoûtés du système politique. Si les gens rejettent les personnels politiques, c’est que les personnels politiques n’ont pas été bons. Il ne faut pas oublier que la démocratie, la laïcité et la République, ce sont des philosophes et non des comptables qui les ont imaginées. »
Et au niveau international ?
HP : « L’urgence c’est Daesh. Un point c’est tout. Avant on ne savait pas sur quel pied danser, maintenant, il faut être avec les Américains et avec les Russes. »
On sent une impuissance face à ces événements...
HP : « Quand on regarde l’histoire du monde, il y a toujours eu un événement dramatique qui a changé les choses, comme Pearl Harbour. C’est malheureux à dire, mais je suis intimement persuadé que le 13 novembre sera un événement déclencheur pour plein de choses. »