Interventions Hervé Poher Loi sur la biodiversité seconde lecture
Article 32 bis AA : Activités dans les réserves naturelles
Je ne suis pas d’accord avec la lecture de Monsieur Cardoux et de Monsieur le rapporteur.
Et je voudrais vous citer un vieux proverbe chinois que je viens d’inventer : « Un pékinois qui mesure 30 centimètres au garrot et qui est blanc avec des tâches noires, ce n’est pas un pékinois ; c’est un dalmatien ! ». Tout cela pour dire qu’une réserve naturelle où on peut tout faire, ce n’est plus une réserve naturelle… Eventuellement, ce peut être un Parc naturel mais ce n’est plus une réserve naturelle.
Une réserve naturelle, ça a un but, une finalité, des objectifs et une fonction.
Et j’ai, pendant plus de 15 ans été président d’un syndicat mixte qui a géré 3 réserves nationales.
La première était constituée de marais… Et bien, on y péchait parce que les associations locales avaient signé un accord avec le gestionnaire. Les 2 autres étaient gérées en accord avec les chasseurs qui nous aidaient à faire de la régulation… Et sur l’une d’entre elles, bien connue et qui s’appelle Oye-Plage, on a même déplacé les huttes en accord avec les chasseurs.
Alors ne touchez pas à l’esprit de la loi. Les réserves sont quand même des lieux de liberté et de beauté.
Article 33A : Absence de perte nette, gain en biodiversité
Je me vois obligé de vous faire part de mon questionnement.
Je sais que nous sommes là pour légiférer et que pour légiférer, on utilise plutôt un langage de juriste… Parfois même, il y en a qui parle en latin !
Et le langage des juristes a ceci de commun avec le langage médical, c’est qu’il a été inventé pour que les non-initiés ne comprennent rien.
Langage de juriste, certes ! Mais cette loi est quand même écrite en français.
Et en français, les mots ont un sens et les phrases ont des significations.
Alors, laissez-moi répéter ce qui me semble une évidence… Et que j’avais déjà signalé en première lecture… Quitte à passer pour un vieux radoteur.
A l’article II et IIbis, vous avez validé, mardi soir, la notion « d’éviter, réduire compenser ». C’est écrit dans la petite loi. Vous avez donc validé de facto la notion d’absence de perte nette…. Car si vous évitez les impacts sur la biodiversité, le capital biodiversité reste le même. Et c’est bien ! … Car si vous réduisez et compensez les impacts sur la biodiversité, le capital biodiversité reste, là aussi, le même puisque vous l’avez compensé. Il n’est peut -être plus identique en qualité mais il est le même en quantité.
Donc, en acceptant la démarche « Eviter/Réduire/compenser », on officialise la notion « d’absence de perte nette ». C’est du français non juridique peut-être mais c’est du français.
Donc autant l’afficher clairement.
Ensuite, je vous rappelle, encore une fois, que cette loi s’appelle « Reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages ». Elle ne s’appelle pas « Déclin », « maintien » ou « Sauvetage » de la biodiversité : elle s’appelle « reconquête » … Et jusqu’à preuve du contraire, à la fin d’une reconquête réussie, on en a plus qu’au début de la démarche…
Donc la notion de « gain » pendant ou à la fin d’une reconquête n’est pas incohérente, n’est pas malvenue… Et j’avais l’innocence de croire que si on faisait des lois, quelle que soit la loi, c’était quand même pour y gagner quelque chose.
Et permettez-moi de dire, avec un soupçon d’humour, que si, pour les responsables politiques, une reconquête, c’est le statuquo, uniquement le maintien, voire la diminution… je suis très rassuré pour les gouvernants en place.
Hervé Poher
2/05/2016: Loi sur la biodiversité