Lettre à Madame Najat Vallaud-Belkacem,
Ministre de l’Education Nationale
Objet : Sortie du collège de Guînes (62340) du RRS
Guînes, le 22 novembre 2014
Madame la Ministre.
Permettez-moi d’attirer votre attention sur un dossier qui met toute une collectivité en ébullition, voire en émoi. Et quand je parle de collectivité, ce sont des parents, des enseignants, l’ensemble des élus et le simple citoyen. Le collège de Guînes « devrait perdre» son classement d’établissement en Réseau de Réussite Scolaire (RRS). Et avec lui, tous les établissements primaires qui y sont attachés.
En tant qu’ancien maire de la commune, en tant que Conseiller Général du canton et en tant que Sénateur du département du Pas-de-Calais, j’ose affirmer qu’une telle décision est et serait inique parce que basée sur des arguments comptables et mathématiques qu’il est facile de dénoncer. Une telle décision ferait fi de la réalité du terrain, ferait fi de l’histoire et de la sociologie locale, ferait fi des efforts consentis depuis plus de 15 ans.
On évoque des chiffres qui ne sont que des chiffres, des moyennes ou des artéfacts mathématiques qui ne sont que moyennes ou artefacts :
On nous parle d’un taux de boursiers un peu bas ! Comment se fait-il que certains établissements « devant être classés en RRS » ont un taux encore plus bas ? Un taux de boursier bas alors que le taux de PCS défavorisés reste élevé ? Le non-retour des dossiers peut facilement s’expliquer.
On nous fait la remarque que « le taux d’élèves en retard est bas » ! Nous pensions naïvement que « cela était normal » : les instructions nationales ne disaient-elles pas « pas de redoublement ». On va donc pénaliser les établissements obéissants et pousser ouvertement à la désobéissance.
On nous signale le taux très faible de résidents en Zone Urbaine Sensible !!! Guînes et son canton font partie d’un pays rural ou semi-rural. Et jusqu’à preuve du contraire, les problèmes de l’enfance et de l’éducation ne sont pas uniquement réservés à la ville !
On a même évoqué le revenu moyen par habitant. Un milliardaire au milieu de trente personnes à la limite du seuil de pauvreté, ça donne mathématiquement, un revenu moyen « acceptable »… pour l’administration certes, mais pas pour les 30 personnes.
Bref, dans une commune qui a 22% de chômage, dans une commune qui a créé le premier Centre Intercommunal d’Action Sociale au nord de Paris, dans une commune où il est prouvé médicalement, « trop de retards de langage », « trop de handicaps sensoriels tardivement traités », « une absence flagrante de limites éducatives » et une « marginalisation trop facile des adolescents »… Bref, dans une commune qui traine quelques handicaps issus d’une sociologie complexe et fruit d’une histoire tout aussi complexe, vous ne pouvez pas arrêter un effort de redressement. Effort de redressement donné, depuis des années par la collectivité dans son entier, avec un corps enseignant motivé et des parents d’élèves volontaires.
On reproche au collège un taux de réussite au brevet… Et alors, cela prouve simplement que l’effort est payant, que la dynamique est bonne et que ce qui a été porté à bout de bras, depuis des années, donne enfin, quand même, quelques résultats. Tant mieux pour nous tous… mais est-ce une raison pour arrêter ? Au contraire !
A l’heure ou l’éducation et l’échec scolaire sont devenus des priorités gouvernementales, vous ne pouvez pas donner à une collectivité en train de « sortir la tête de l’eau », un message aussi négatif.
Madame la Ministre. Je demande instamment que la décision soit revue à l’aulne non pas de calculs mathématiques mais en regardant et en écoutant les gens du terrain.
Il n’y a pas de quoi être fier : être dans un réseau, c’est pour une société reconnaitre un problème. Le principal, c’est de l’assumer et d’essayer de le résoudre. Le collectif guînois l’a toujours fait et veut continuer à le faire.
Nous sommes l’exemple type d’une collectivité qui veut et qui peut s’en sortir par l’éducation. Mais il ne faut pas qu’on nous laisse au bord de la route.
Recevez, Madame la Ministre, l’expression de mes sentiments les plus respectueux.
Hervé POHER
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Lettre à Monsieur Guy Charlot
Inspecteur d’académie
du Pas-de Calais
Guînes, le 22 novembre 2014
Monsieur l’Inspecteur d’Académie
Permettez-moi d’attirer votre attention sur le cas de Guînes, de son ensemble éducatif et de son collège.
Il semble maintenant certain que le collège va sortir du Réseau Réussite Scolaire, collège et écoles primaires s’y rattachant.
Ceci serait une erreur manifeste alors que les prémices d’une amélioration se font sentir. Grâce à la mobilisation de tous, je dis bien de tous, une dynamique positive a été créée. Et, vous le savez, nous partons de loin : c’est l’ancien maire qui vous le dit et l’ancien médecin généraliste qui vous le confirme.
Bien sûr, je sais qu’on pourrait me répondre que « sortir d’un réseau, cela prouve que ça va mieux ». Aller mieux, ce n’est pas être guéri, Monsieur l’Inspecteur ou alors, nous n’avons pas la même définition de ce qu’est la bonne santé !
Cette décision, prise, comme bien d’autres d’ailleurs, en fonction de chiffres auxquels on fait dire ce que l’on veut, est une décision « hors sol », inadéquate dans la forme et dans le temps.
Je me permets de vous transmettre copie du courrier que j’adresse, ce jour, à Madame la Ministre de l’Education Nationale.
J’espère que ce dossier est encore révisable et que l’intérêt humain et éducatif saura prévaloir sur les arguments comptables et budgétaires.
Recevez, Monsieur l’Inspecteur, l’expression de mes salutations.
Hervé Poher
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Lettre à Monsieur Jean-Jacques Pollet,
Recteur de l’Académie de Lille
Guînes, le 22 novembre 2014
Monsieur le Recteur.
La rumeur courait, les journaux l’ont confirmé. Le collège de Guînes et son réseau vont perdre le statut de RRS.
Permettez, Monsieur le Recteur, que je m’élève contre une telle décision :
parce que c’est une décision basée sur des chiffres, sur des moyennes et sur des interprétations ;
parce que c’est une décision qui ne tient en aucun compte de la réalité du terrain avec sa vérité sociale et sa vérité économique ;
parce que l’effort entamé, il y a plus de 17 ans, par les enseignants, les parents, les élus et par d’autres… Cet effort est bien mal pris en compte ;
Parce que nous sommes fiers, localement, des quelques résultats qui commencent à apparaitre mais, bizarrement, nous sommes récompensés par « moins de moyens, moins de dynamique, moins de considération ».
Parce que nous ne sommes pas des urbains… Et alors !
Les quelques résultats qui peuvent enfin redonner espoir à toute une collectivité auraient dû amener le ministère à dire : « C’est bon ; enfin on est sur la bonne voie ; on continue… Voire, on amplifie. » Hélas, c’est tout le contraire qui nous est expliqué, qui nous est appliqué.
Monsieur le Recteur, je connais bien cette ville, ce canton, ces populations. Ce n’est que par l’école, par l’éducation et par une dynamique collective que nous trouverons les solutions à certains maux.
Je vous transmets copie du courrier que j’adresse à Madame la Ministre de l’éducation en espérant que nos décideurs nationaux et régionaux puissent encore prendre des décisions politiques et encourager ainsi les volontés locales.
Recevez, Monsieur le Recteur, l’expression de mes salutations respectueuses.
Hervé Poher