Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs,
Depuis 1997, date de création de notre Intercommunalité, j’ai pris l’habitude de comparer notre collectivité à un enfant qui grandit, qui s’épanouit, qui traverse tous les stades de la jeunesse avec ses certitudes, avec ses interrogations et avec un vécu qui lui forge, petit à petit une personnalité.
Mais aujourd’hui, afin de vous étonner, je ne jouerai pas les « papa poules » ; je vais me transformer en ancien combattant… Et en tant qu’ancien combattant, je me dois d’évoquer l’année 1996.
Cette année là, le Conseiller Général que je suis, labourait le terrain, rencontrait les élus et avec l’aide de quelques techniciens et élus, essayait de préparer les esprits à une mini-révolution : la création d’une Intercommunalité. Fallait-il créer cette Intercommunalité ? moi et certains autres en étions persuadés… Mais vous le savez, ce n’était pas l’avis de tout le monde !!
Et quotidiennement, j’entendais les mêmes réflexions :
- « Encore une structure supplémentaire ! on en a déjà assez »
- D’autres, encore, râlaient en disant « c’est des impôts en plus ; cela devient intolérable ! »
- Et dans les yeux de certains, je pouvais lire « il est Maire de Guînes, c’est la grosse ville qui va tout rafler ! ».
Et ce type de réflexions était naturel, compréhensible voire légitime.
Aussi, lorsque le Préfet a décidé, début 1997 de créer la Communauté de Communes des Trois-Pays, je dois l’avouer, le plus dur restait à faire et nous le savions :
- Il fallait rapidement rassurer tout le monde,
- Il fallait rapidement imposer une dynamique,
- Il fallait rapidement créer une image.
Et pour réussir ce triple pari, nous devions, impérativement définir le plus petit dénominateur commun à toutes nos communes… Très naturellement, ce dénominateur commun s’est imposé à nous : le Vert, le Vrai, la Vie, c'est-à-dire la ruralité.
Si aujourd’hui, on examine notre démarche, on peut dire que c’était une évidence, presque trop facile, car la ruralité était devenue, en une décennie un mode de vie, une mode de loisirs et une aspiration naturelle pour beaucoup de gens.
En 1970, quand on vous traitait de ruraux, c’était presque péjoratif. En 2000, c’était devenu un atout. Parce que les esprits ont changé ; parce que les loisirs ont changé, parce qu’avec un aménagement du territoire intelligent, il était devenu facile de travailler en ville et d’habiter à la campagne.
Bien sûr, nous avons triché un peu… Parce que Guînes n’est pas une vraie commune rurale. Mais vous le savez bien, le fonctionnement urbain et la mentalité des Guînois, se rapprochent plus des petites communes rurales de l’Arrière-Pays que de l’Agglomération Calaisienne. De plus, les Guînois l’ont parfaitement admis, car avec leur esprit de clocher exacerbé, ils ont vite compris qu’il vaut mieux être grand parmi des petits que petit à côté d’un grand.
Et c’est avec cette notion fondamentale de « cultiver notre ruralité » que nous avons avancé.
- Tout doucement pour ne pas effaroucher les uns,
- Sereinement pour ne pas traumatiser les autres,
- Mais avec ambition et détermination pour que nos partenaires et nos financeurs viennent naturellement conforter la dynamique locale.
Un contrat rural sur l’eau, un contrat de développement rural, un contrat petite enfance, une maison de l’enfant, une OPAH, une multitude d’actions d’aménagement du territoire…et j’en passe, nous ont permis en cinq ans :
- de rassurer les élus et répondre à certaines attentes de nos populations,
- de fédérer les énergies diverses et variées qui font l’image et l’attrait de notre territoire,
- de mutualiser les hommes, les idées et les moyens pour démontrer que l’union est un vrai facteur de développement local.
Je crois, sans m’avancer trop, que tout le monde a compris que l’Intercommunalité peut bénéficier à tous, à condition que chacun y apporte un peu du sien, honnêtement, sans arrière-pensée et avec le sens aigu du collectif, ce qui n’est pas forcément une démarche naturelle. Dans le fonctionnement de notre structure, nous avons depuis six ans, toujours appliqué deux principes fondamentaux.
1er principe : cibler les dossiers et ne jamais s’engager dans un projet sans avoir exploré toutes les sources de financement possible…en n’oubliant jamais que nous utilisons de l’argent public et qu’on ne doit pas faire n’importe quoi !
2ème principe : être novateurs, originaux, voire exemplaires. Cela satisfait notre EGO et il faut, l’avouer, intéresse nos partenaires.
Ces deux principes sont, bien évidemment les deux moteurs de nos projets 2003 :
Novateur et exemplaire : cette OPAH qui vient d’être prolongée pour un an.
Originale, parce que nous y avons inclus l’opération « Trois-Pays en couleur », où nous subventionnons les peintures de façades.
Originale, aussi, parce que nous y avons intégré le subventionnement des vieilles enseignes pour les collectivités, les artisans et les commerçants.
Originale enfin, parce que nous avons mis en place, à titre expérimental, grâce au Conseil Régional, un fond de subventions pour les économies d’énergie.
Novateur et exemplaire : ce transport à la demande que nous allons installer cette année. Ce service permettra à nos habitants de se déplacer quand ils veulent, où ils veulent et pour un prix modique puisque la collectivité participera aux frais de fonctionnement.
Novateur et exemplaire : cette Maison de Pays que nous allons construire, à Hardinghen. Avec sa halte garderie, sa ludothèque, son cyberpoint, sa médiathèque et j’en passe…Ce sera l’exemple parfait de ce qu’une Intercommunalité peut offrir à des habitants alors qu’une commune ne peut le faire, faute de moyens.
Novateur et exemplaire : ce programme d’entrées et de places de village. Dans chaque commune, nous allons réaménager, grâce principalement à des fonds européens, une entrée ou une place, en accord, bien entendu avec les municipalités.
Il faut que les huit premiers dossiers soient prêts pour Septembre 2003.
Novateur et exemplaire enfin, le programme ARARAT, c'est-à-dire la lutte contre l’érosion des sols et les inondations. Seize kilomètres de haies, douze kilomètres de bandes enherbées, onze mares ; avec l’appui de l’Etat, de la Région, du Département, du Parc ; avec l’accord de plus de 65% du monde agricole… C’est une opération exemplaire qui montre que chacun, élu et citoyen, a compris qu’il fallait réparer les erreurs du passé.
Ces cinq grands dossiers vont occuper pleinement l’année qui commence. Mais, parallèlement à ces cinq grands axes, nous continuerons bien évidemment à développer les politiques touristiques, environnementales et autres que nous avons initiées depuis cinq ans. Et nous nous lancerons cette année dans le contrat temps libre, et nous mettrons enfin en place, cette politique culturelle dont nous venons de prendre la compétence. Mais pour être ambitieux, il faut avoir les moyens. Les moyens financiers, certes. Pour ça, nous nous débrouillons et j’en reparlerai, mais aussi les moyens humains qui aujourd’hui, il faut l’avouer, nous font défaut.
Et c’est logique ! Depuis cinq ans, nous avons consacré une grande partie de nos budgets à de l’investissement, réduisant de fait, le fonctionnement au minimum.
Avec un Secrétaire Général à mi-temps, avec des techniciens mis à disposition ou subventionnés à 50%, avec des emplois jeunes… C’est vrai que le fonctionnement de la Communauté de Communes ne coûtait pas cher. Mais le système a ses limites. Avec le départ de Claude JUNIQUE, avec le départ d’Isabelle vers des cieux plus Boulonnais nous risquons de tomber dans l’inertie et le sur place…Avec de belles idées et peu d’actions. Ceci m’est personnellement insupportable et pour vous, je le suppose, inconcevable.
C’est pourquoi, nous avons demandé à Monsieur Francis LESPLULIER, de prendre le poste de Secrétaire Général des Services, à plein temps.
C’est pourquoi, courant Février, au sein du bureau, nous redéfinirons l’organigramme communautaire et nous procéderons aux embauches nécessaires.
Il ne sert à rien d’avoir des ambitions, si on a pas les moyens de satisfaire ces ambitions.
C’est une nouvelle étape pour nous ; elle est indispensable et cela nous permettra d’aller encore plus loin. Aller plus loin, cela veut dire avoir un bon moteur pour son véhicule…Mais cela veut dire aussi avoir de l’essence. Et l’essence pour nous, c’est l’argent.
Petit à petit nous augmentons nos compétences, petit à petit nous transférons des compétences et pour exercer pleinement ces compétences, nous fortifions et nous confortons notre fonctionnement. Cela veut dire plus de frais donc plus d’impôts. Un principe fondamental de notre système politique veut « qu’a transfert de compétence, il y ait transfert de moyens ».
Depuis des années, la Communauté de Communes des Trois-Pays a pris en charge de nombreuses cotisations à la place des communes (c’est autant d’argent en plus pour elles) ; depuis des années, la Communauté de Communes travaille dans les communes sur du patrimoine communal (chemin, église, signalétique) ; c’est autant d’argent en plus pour elles.
Je compte sur vous tous pour avoir l’honnêteté politique et intellectuelle, de dire à vos populations, de rappeler à vos concitoyens que ce que fait la Communauté de Communes, n’est pas fait, n’est plus fait par la commune.
Cela veut dire, bien entendu, qu’il nous faut ce transfert de moyens : avec logiquement une augmentation des impôts communautaires et une stagnation, voire une baisse des impôts communaux.
J’ai demandé aux services d’élaborer un document qui rappellera ce qui a été dépensé sur chaque commune depuis 1997, en travaux directs sur le territoire de la commune, en aide aux associations et manifestations, en aide aux particuliers. Lorsque vous verrez les sommes, hors subventions, vous serez, quand même, étonnés.
Avant d’en terminer, permettez-moi de remercier nos partenaires :
- l’Etat qui par l’intermédiaire du CDR ou de la DDR est un allié stimulant, précieux et compréhensif,
- la Région qui dès le départ nous a accompagné. Officiellement, les CDR s’arrêtent en 2003, mais nous savons déjà qu’elle continuera à aider les structures qui bougent.
- Le Département, partenaire incontournable qui a toute sa légitimité dans l’accompagnement des collectivités rurales, n’en déplaise à certaines personnes adeptes des « Lilloiseries » ou apôtre d’une « métropolisation - bonduellisation ».
- Le Parc, enfin, qui outre ses moyens techniques et financiers, nous apporte quelque chose d’inestimable : une façon de penser, une façon de concevoir, une façon de réaliser…Ce que, personnellement, j’appelle « l’esprit Parc ».
Merci à tous. Nous savons ce que nous vous devons et nous espérons être dignes de votre confiance.
Mon esprit carabin et moqueur fait que bien souvent, en Janvier, je souhaite aux gens « une bonne acnée, bonne santé »…Les gens sont étonnés alors, je rajoute « c’est normal ; l’acnée c’est un signe de jeunesse et d’adolescence ; cette période où on est plein d’énergie, d’illusions et où on a envie de refaire le monde.
Alors je souhaite à notre Communauté de Communes une bonne poussée d’acnée et à chacun d’entre vous beaucoup de joie, de satisfactions et beaucoup d’amour… Sachant que même dans le cadre de la décentralisation, l’amour n’est pas une compétence qui peut être transférée à une collectivité.
C’est aussi bien comme cela, car si la prise de compétence était possible, tous mes Vice-Présidents se battraient pour présider cette commission là et moi, pour calmer tout le monde, je me verrai obligé de la garder dans mes prérogatives personnelles.
Mesdames et Messieurs, on peut toujours rêver.
Hervé Poher