Il y a quelques semaines, Éric m’a téléphoné pour dire, qu’à l’occasion du mariage, il voulait faire un discours. Et, bien entendu, pour parler des qualités de Constance. Je me suis senti obligé de répondre que je ferai la même chose mais pour parler des qualités de Vincent. Et là, j’ai eu un gros problème et j’étais à sec… Car les qualités, je n’en ai pas trouvé beaucoup.
Alors, je suis allé à la bibliothèque et j’ai découvert un texte de Pierre Corneille. Ce texte devait être dans « Le Cid » mais pour finir, il ne l’a pas mis.
Voici ce texte :
« Eh là donc, Mon cher père ! Seriez-vous donc l’auteur
D’une cabale infâme qui salit mon honneur ?
Car depuis quelques jours, je me vois attaqué,
Malmené et blessé … Et vous êtes concerné !
Des bruits et des rumeurs dont je deviens l’otage
Sont en train de pourrir ma vie à Sassenage.
Dans un délire sénile, vous auriez affirmé
Que je n’avais pas l’once d’une seule qualité ;
Qu’à peine né, j’avais, par pure contradiction
Décidé d’une croisade en réanimation ;
Puis après quelques temps, faisant encore plus fort,
Pour vous importuner, j’ai fermé mon pylore ;
Que chaque nuit j’avais, pendant quelques années
Envahi votre couche, quitte à vous faire tomber ;
Que dès la maternelle, vous deviez, le matin,
Tailler la touffe de poils qui poussait dans ma main
Et que la connaissance me semblant toute acquise,
Je répondais toujours : « Moi je m’économise. »
Que vicieux comme un rat, je cachais sous mon lit
Des grimoires dérobés dans vos Hara-Kiri ;
Qu’un beau jour, la matrone qui m’enseignait le bien
Vous appela pour dire que j’étais un vaurien
Car moultes damoiselles me traitaient d’obsédé
Car pendant la récré, je voulais embrasser ;
Que quand je fus pubère, en plus d’un nez tordu,
En découvrant la femme, je parlais un peu cru ;
Ayant des réflexions déplacées, un peu sottes,
Ne parlant que de sexe, de foufoune et de motte.
Que craignant de vous voir toujours insatisfait,
Je partis me loger dans une boite de curés.
Qu’ayant sur la conscience les malheurs de mon père,
Je vins faire pénitence au fin fond de l’Isère ;
Qu’après quelques années, ayant touché le fond,
J’allais me flageller en la perfide Albion ;
Qu’écœuré de la bouffe de ces bâtards d’anglais,
Je rentrai à Grenoble faire semblant de chercher ;
Et qu’alliant le bestial à la provocation,
Je pris une compagne frisée comme un mouton ;
Et, horreur des horreurs, en n’étant pas mariés,
Nous avons forniqué et elle a enfanté…
Mon père, tout ça pour dire que vous êtes bien dur !
Moi qui suis si gentil, si charmant et si pur…
Moi qui n’ai jamais fait de mal à un moustique…
Comment pouvez-vous donc être aussi satanique ? »
Ce à quoi le papa, un peu abasourdi
Répliqua « Te plains pas… Car je n’ai pas tout dit !
Signé Pierre Corneille
En étant plus sérieux :
Ne pas se marier pour la régularisation,
Ne pas se marier par obligation,
Ne pas se marier par conviction,
Ne pas se marier par convention,
Ne pas se marier par contradiction,
Mais se marier uniquement pour le plaisir
Avouez, c’est quand même exceptionnel !
Hervé Poher