Montreuil-sur-Mer, le 16/12/2011
5 minutes ; 5 points
Premier point: Un constat tout d’abord.
Depuis quelques semaines, nous sommes officiellement 7 milliards d’humains sur terre. Et nous serons, sans doute, 15 milliards en 2050.
Et, comme vous, je le suppose, j’ai été frappé par l’attitude des médias lorsqu’ils ont parlé de cet événement : tous les médias parlaient de ce cap très symbolique avec joie mais une joie teintée d’une légère inquiétude.
Car tous ont signalé et se sont interrogés sur les conséquences d’une telle évolution démographique. Et pour tous, médias, scientifiques, politiques, le problème majeur des futures décennies, c’est l’eau, l’accès à l’eau et le rappel de la primauté de l’eau dans tous les processus de vie.
Maintenant quand on parle « avenir de l’homme et avenir de la planète », systématiquement, on évoque le climat, la biodiversité et surtout, on parle de l’eau. C’est presque une banalité de dire que l’eau, c’est la vie… mais ce message là, c’est aux jeunes qu’il faut le passer parce que les jeunes comprennent plus vite. Ils comprennent plus vite car il est prouvé qu’après 25 ans, on détruit plus de neurones qu’on en fabrique. C’est d’ailleurs pour ça qu’il est plus facile d’apprendre avant 25 ans qu’après. Donc, apprenons aux jeunes Je crois savoir qu’ici, c’est par et avec les jeunes que vous avez avancé.
Deuxième point: La Directive Cadre sur l’Eau, cette directive européenne, cette ordonnance, qui nous dit qu’en 2015, nous devrions avoir un bon état écologique de toutes nos masses d’eau… En sous-sol, en surface et même la mer… Tout doit être « nickel »…
Dans notre bassin Artois-Picardie, nous n’y arriverons probablement pas et il nous faudra 6 ou 12 ans de plus.
· Parce que l’histoire a laissé des traces,
· parce que les pratiques ont fait que…
· parce que la conjonction de plein de facteurs naturels ou humains font que chez nous, ce sera plus difficile qu’ailleurs…
Mais le principal, c’est que nous soyons quand même sur le chemin, que nous ayons amorcé la démarche et que tous les acteurs sociétaux, élus, professionnels, citoyens, tous ces acteurs aient conscience de cette urgence, de cette ambition, de cette priorité : le bon état de l’eau !
Le rôle d’un élu ou d’un citoyen, c’est d’investir pour l’avenir… Et le meilleur des investissements et le plus beau cadeau à notre jeunesse, c’est une eau qui mérite son nom. L’élu et le citoyen ne demandent pas mieux que de s’investir dans cette noble tâche et c’est pour cela qu’il faut de la concertation, des explications, de la sensibilisation… Je crois qu’ici vous avez fait cet effort.
Troisième point: Les spécificités de notre département… spécificités qu’il faut intégrer dans nos diagnostics et dans nos raisonnements, sinon, on tape à coté.
Le grand nord de la France est souvent représenté comme une région urbaine et industrielle… Or le Pas-de-Calais, même s’il a eu, et on aurait aimé qu’il la garde, une grande histoire industrielle, le Pas-de-Calais est surtout un grand département agricole.
Ce qui fait que nos objectifs, nos moyens et notre façon d’appréhender la gestion et la protection de l’eau seront imbibées et marquées de ces caractéristiques là. Et cela, nous devons tous l’intégrer, tous autant que nous sommes, contents ou pas contents. Nous n’avons pas forcément les mêmes problèmes que nos voisins et il y a une réalité de terrain. Et on n’aura pas d’avancées sans discuter avec les hommes pour qui la terre est un outil de travail.
Quatrième point : L’eau est pour notre département, une richesse exceptionnelle, même si les inondations nous posent parfois des soucis. Et je suis l’élu de Guînes et de la vallée de la Hem… Depuis hier, j’ai quelques préoccupations… Mais il est bien connu que les riches ont quand même, parfois, quelques soucis.
Mais cette richesse, il faut savoir la gérer intelligemment et la faire fructifier. C’est pourquoi le Conseil Général a décidé d’élaborer un schéma départemental de la ressource en eau.
De plus, dans le cadre de la grande réorganisation des intercommunalités, des syndicats et des structures, et d’après ce schéma, il a semblé intelligent d’imaginer une gestion de l’eau, en particulier l’eau potable, à l’échelle d’un Sage. C’est une dimension tout à fait arbitraire, certes, mais qui a une certaine logique et une certaine cohérence. C’est du moins, une des propositions de l’Etat et, en tant que Président du Comité de Bassin, je me permets de dire que cela semble intelligent.
Cinquième point et pour en terminer: nous sommes dans un théâtre… la pièce s’appelle « Le Sage de la Canche »… Et « Au théâtre ce soir », on disait « les décors sont de Roger Pruvost et les costumes de Bruno Roussel ».
Monsieur Roger Pruvot que j’ai connu sur d’autres scènes et dans d’autres théâtres… Nous n’étions pas dans des navires de même couleur, mais Roger et moi, nous faisions, intellectuellement, souvent escale aux mêmes endroits. C’est normal ! Nous avons une sorte de complicité corporatiste… Nous avons fait le même métier, le métier de médecin… Mais avec une différence majeure : moi j’étais bon médecin ; lui, c’était un charlatan !... Et en disant cela, je suis imprudent car je sais qu’il va reprendre la parole après moi…
Mais malgré nos différences et parce que j’ai un bon diagnostic, je sais reconnaitre la passion, la motivation et l’expérience là où il y en a… et monsieur Pruvot n’en manque pas, il faut bien l’avouer. Et c’est sans doute un plus pour ce Sage de la Canche… Et malgré tous ses défauts, permettez que je donne, devant vous, à Roger un salut très amical, aussi bien de ma part que de la part de ses anciens collègues du Conseil Général.
Et, celui qui taille les costumes, ici, c’est Monsieur Bruno Roussel, que je connais aussi, depuis bien longtemps… Monsieur Roussel est, comment dire, un râleur patenté, un contestataire génétique… Et si je me permets de dire cela, c’est que je suis de la même race que lui, de la même trempe et de la même déviance et que je connais parfaitement ce type de fonctionnement.
Avec, toutefois, une conséquence intéressante pour vous tous : c’est qu’on peut se permettre d’être contestataire quand on est, soi-même, incontestable… C'est-à-dire très bon dans son domaine de compétence.
Et un contestataire, quand il s’inscrit dans la gestion publique, devient bien souvent, un perfectionniste. Comme il râle, il se doit d’être très bon dans ses dossiers et il travaille plus que les autres… Et le tempérament de Bruno Roussel est sans doute un plus pour ce Sage de la Canche…
Monsieur Roussel, vous avez dit, tout à l’heure que le préfet vous avait dit que vous étiez un utopiste. Répondez à Monsieur le Préfet ce que Oscar Wilde disait : « Le progrès n’est que l’accomplissement des utopies ». Alors, soyez un homme d’utopies et vous serez un homme de progrès.
Voilà, Mesdames et Messieurs, 5 points rapides que je voulais évoquer.
Un but pour l’avenir ; une ambition pour les jeunes ; une volonté de réparer nos erreurs; des hommes de conviction…. Tout cela va faire, pour ce Sage de la Canche, une bien belle dynamique… Et Roger pourra, enfin, avec ses enfants, ses petits-enfants, ses arrières petits-enfants, en toute sérénité, faire simplement des ronds dans l’eau.
HERVE POHER