Réunion de la Fédération Ps 62, en présence de François Hollande
INTERVENTION WINGLES , le 03/09/05
Mes chers camarades.
On m’a demandé de rédiger une ordonnance concernant notre système de santé. Je l’ai donc fait ; elle ne coûte pas cher…..du moins pour l’instant.
Permettez-moi de rappeler quelques constantes :
- La santé est une valeur importante de notre société
- Lorsque l’on fait un sondage, les français répondent toujours que la santé est le système auquel ils sont le plus attachés.
- Quand on vous parle de santé, on ne vous parle que d’équilibre budgétaire, de finances et, surtout, de déficit. On accuse les malades qui ne sont pas raisonnables ; on accuse les médecins qui ne font pas attention ; on accuse les cotisations qui ne rentrent pas. C’est vrai que c’est un peu tout ça…Mais le vrai responsable, c’est la médecine elle-même. Se soigner coûte de plus en plus cher mais le résultat est qu’on vit de plus en plus vieux.
Pourtant la santé est malade
- Dans son fonctionnement
- Dans ses finances
- Par ses inégalités
Avant de rédiger l’ordonnance, nous avons, avec le groupe de travail, fait un diagnostic et nous avons relevé 4 types d’inégalité.
Tout d’abord l’inégalité sociale.
· La médecine est devenue une activité rentable, commerciale et source de profits. Et on assiste de plus en plus à une privatisation de celle-ci avec ce terme horrible de « dépassements d’honoraires ». Soyons francs, mes chers camarades, les gens défavorisés n’ont pas les mêmes possibilités que les autres pour se soigner ! Et l’on voit de plus en plus la montée en puissance de grands groupe financiers qui s’impliquent dans le système de soins. Et ils osent dire qu’ils font du service public !! Non, ils font du pognon. Il faut avoir le courage de le dire. Si vous avez une cirrhose du foie, si vous avez une maladie de longue durée, si vous êtes un clochard, les cliniques ne vous prennent pas.
· Et que faire pour les étrangers en situation irrégulière ? Les médecins ont prêté le serment d’Hippocrate qui nous oblige à soigner tout le monde, sans discrimination.
· Inégalités pour les personnes âgées qui bien souvent, ne peuvent plus se payer une mutuelle et n’ont plus accès au système de soins.
· Inégalités, enfin, vis-à-vis des pathologies mentales, encore considérées comme de la sous-médecine.
Ensuite, nous avons relevé des inégalités géographiques.
Je prendrai un exemple….au hasard. Le Nord/Pas de Calais n’est pas premier partout. Mais il y a bien un domaine où nous sommes en tête.
Nous avons l’espérance de vie la plus faible de France.
Nous avons le taux de morbidité le plus haut de France.
Nous sommes les premiers pour : les cancers de la gorge, du poumon, cancer du sein, cancer de l’intestin et cancer de l’utérus. Nous sommes encore les premiers pour les maladies cardiovasculaires et les cirrhoses du foie. Et enfin, mes chers camarades, nous sommes les premiers pour les suicides….surtout chez les jeunes.
Et, paradoxalement, nous sommes plus malades et nous avons moins de moyens pour se soigner. Et lorsque l’on demande aux spécialistes pourquoi il y a des poches de pathologies, Calais, Boulogne, Lens, Liévin….ils vous répondent qu’ils ne savent pas, mais que lorsqu’on prend la carte du chômage et celle des pathologies, elles se superposent exactement ! Sans commentaires.
Inégalité de moyens. Un seul chiffre : Nord/pas de Calais, 4,5 millions d’habitants, 1 CHRU. La région parisienne, 11 millions d’habitants, 11 CHRU….Et pourtant, nous avons réclamé. Mais personne ne nous entend. Serait-on des bâtards d’anglais ; serait-on des bâtards de flamands ?
Inégalité financière, enfin. L’acte II de la décentralisation a permis aux Conseils Régionaux de participer à la politique de santé, en siégeant à l’ARH. Mais à condition de mettre de l’argent sur la table. Il semble évident que les régions riches pourront plus s’impliquer que les régions pauvres. Le Nord/Pas e Calais ne pourra pas mettre autant que la Région Ile de France, que la Région PACA, que la Région Rhône Alpes et le différentiel va donc s’accroître.
J’ai donc rédigé une ordonnance avec 10 commandements :
1er commandement : Sortir d’une logique entièrement financière. La médecine n’est pas uniquement un problème d’argent, c’est aussi un problème de volonté. Et il faut rappeler au corps médical que la médecine n’est pas uniquement une boite à sous.
Ensuite, il faut défendre le service public, quitte à le réformer ! Il faut le rendre aussi performant que le privé.
Il faut développer les actions de prévention et instituer la prévention comme un acte médical à part entière. Il faut même rendre certains dépistages obligatoires.
Il faut développer la médecine scolaire et la médecine du travail.
Il faut développer les actions d’accompagnement social et psychologique, par les médecins et par les associations. « Parler, ça ne coûte pas cher, mais ça peut rapporter gros ».
Il faut réclamer cette péréquation qui est notre dû. C’est une question de justice. Martine Aubry nous l’avait donné ; Raffarin nous l’a reprise.
Il faut prendre des mesures pour inciter, voire obliger les médecins à s’installer dans les régions en manque de personnel médical.
Il faut développer les structures pour handicapés, pour les malades souffrant de la maladie d’alzeihmer ou de toutes les pathologies dues à la vieillesse. Et j’ajouterai, les structures d’aide psychologique et psychiatrique, surtout à destination des jeunes.
Il faut demander à l’Etat d’être logique. On ne peut pas lutter contre le tabac et l’alcool et empocher les taxes dans le budget général de l’Etat.
Il faut enfin, que le Parti Socialiste, affirme haut et fort que le travail, l’éducation, le logement et la lutte contre la pauvreté sont, quand même les meilleurs médicaments et qu’avec tout ça, on peut guérir presque tout.
Voilà l’ordonnance que nous avons rédigée. Bien sur, elle peut paraître utopique, mais je tiens à vous rappeler, mes chers camarades :
- Que sans l’utopie, il n’y aurait pas de Parti Socialiste
- Et pour la trois centième fois que le progrès n’est que l’accomplissement des utopies.
Hervé Poher