Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs,
1er Mai oblige, je me dois aujourd’hui de vous parler de l’emploi ; mais, comme d’habitude, je vous parlerai du chômage et cette année, vous vous en doutez, mes propos seront teintés d’inquiétude, voire même d’un peu d’amertume. Les récents mouvements dans le Calaisis, nous obligent à nous interroger ; et cela quelles que soient nos opinions personnelles.
Mais tout d’abord, un petit point sur la situation Guînoise :
- Le dernier chiffre du chômage, fin Mars, indiquent 401 chômeurs à Guînes. Fin 97, nous en recensions 567 ; c’est à dire qu’en un peu plus de trois ans, le chiffre du chômage a baissé de plus de 29%. Cette évolution est positive pour notre cité ; il faut simplement souhaiter qu’elle le reste.
Mais pour qu’elle le reste, il nous faut conserver ou créer certains facteurs essentiels.
ð Tout d’abord, maintenir une économie nationale vigoureuse, dynamique et créatrice d’emploi : un million de chômeurs en moins en quatre ans, une hausse des créations d’emplois et une baisse des suppressions. Mais on peut faire encore mieux. Vous le savez tous, de nombreuses entreprises sont demandeuses de personnel : nouvelles technologies, le bâtiment, les services à la population, les activités de consommation…
Seul freins à ces embauches : les employeurs demandent un minimum de qualification, un minimum de diplômes spécialisés, voire, parfois un minimum d’expérience. C’est pourquoi, la bataille de l’emploi se gagnera aussi par la formation et je dirais, surtout par la formation.
Il est anormal de constater que beaucoup d’entreprises de travaux publics ou du bâtiment, débordées de commandes, débordées de chantiers, soient prêtes à embaucher, mais qu’elles ne le font pas par manque de personnel qualifié.
Résoudre le problème du chômage des adultes, c’est aussi s’occuper d’une vraie formation pour les jeunes.
ð Autre facteur essentiel pour notre économie locale, c’est que nous ayons, enfin, réglé le problème de notre zone d’activités. Et aujourd’hui 1er Mai 2001, je peux vous affirmer : nous voyons le bout du tunnel.
Une campagne électorale récente a montré que tout le monde n’a bien saisi la difficulté de ce dossier, les résoudre « ubuesques » de ce dossier et les complications juridiques de ce dossier.
La campagne étant terminée, même si, permettez-moi de prendre le temps, de vous en faire un rapide résumé.
· Dans les années 90/91, la Municipalité de Guînes a créé une zone d’activités, Route d’Ardres. Immédiatement, l’entreprise Charlitt s’y est installée. Mais pour continuer les installations il fallait avoir un plan de lotissement et il fallait faire un aménagement complet de la zone.
Cet aménagement étant très cher, le dossier fur rangé dans les tiroirs.
En 1995, premier coup dur. Suite à la plainte d’un particulier, le Tribunal Administratif a déclaré notre zone illégale, parce qu’elle n’était pas inscrite dans un document indispensable : le Schéma Directeur du Calaisis.
En 1997, notre zone n’existant plus, le même particulier a demandé la destruction de Charlitt. Bien entendu, nous avons refusé et le Tribunal nous a donné raison.
En 1998, le Schéma Directeur du Calaisis, qui devait sortir en 1995, est enfin publié. Deuxième coup dur ; une seule faute de frappe se glisse dans ce document de 200 pages…et comme par hasard, cette faute concerne la zone de Guînes. Bien entendu, le particulier attaque en justice et heureusement, le Tribunal nous donne raison en Mars 2000.
Bref, une zone créée en 1990 est rendu légale en 2000. Dix ans de perdu.
Dix ans, pendant lesquels il est impossible d’aménager ou d’installer des entreprises.
Mais maintenant que les visciatudes juridiques semblent terminées, il nous faut achever la démarche. La Mairie et les Services de l’Etat sont en train d’élaborer ce fameux plan de lotissement, sous lequel nous n’avons pas le droit d’autoriser les constructions.
Alors, aux entreprises qui attendent pour s’investir à Guînes, je dis simplement : « avant la fin 2001, tout sera réglé ».
Le Conseil Général a déjà voté d’importants crédits pour modifier la route et nous comptons sur une demande légitime auprès de l’Etat pour boucler le financement de cet important chantier.
Notre vie collective, à Guînes, dépend aussi d’un autre facteur : la dynamique loco-régionale, c’est à dire la dynamique du Calaisis.
Cette dynamique si longtemps espérée doit pouvoir venir et on la sent venir…encore faut-il que nous ne subissions pas de « mauvais coups » comme avec les « petits LU ».
Si je me permets d’évoquer ce sujet, c’est que plusieurs familles Guînoises sont, aujourd’hui, touchées et que la Municipalité a été, l’une des premières, à voter une motion de soutien aux employés de l’usine LU.
Ce qui se passe aujourd’hui, n’est que le signe d’une véritable interrogation…et quand on a pas de réponse à une interrogation, il y a malaise.
Jusqu’à la fin des années 80, les choses avaient, apparemment, le mérité d’être relativement simples :
ð D’un côté, le système libéral où l’économie était le seul moteur de la société ; c’est les Etats-Unis.
ð De l’autre côté, le système dit « collectiviste » affirmait que l’économie n’était qu’un des facteurs d’une politique dogmatique, voulue et imposée par l’Etat ; ça c’était le pays de l’Est.
ð Et entre les deux, il y avait des systèmes hybrides, comme la France, où tout en étant dans une économie libérale, le poids de l’Etat permettait l’application de certaines avancées sociales.
L’effondrement des pays de l’Est et du système collectiviste a changé complètement les règles du jeu : maintenant, on parle de libéralisme, de privatisation, de globalisation, de mondialisation.
C’est sans doute le moins mauvais des systèmes, puisque c’est le seul qui reste, mais vous ne pouvez pas empêcher que des gens se posent des questions, que des gens contestent cette philosophie du « tout ou rien » et même que des gens se révoltent. D’autant que nous vivons dans un pays qui a une longue histoire, qui a vécu d’avancées sociales peu égales et qui a longtemps défendu une certaine vision de la solidarité ou de l’humanisme.
· Quand une entreprise licencie parce qu’elle perd de l’argent ou qu’elle va à la catastrophe :
Affectivement cela nous peine
Mais intellectuellement, on peut le comprendre.
Mais
· Quand une entreprise licencie alors qu’elle fait des bénéfices importants :
Affectivement, cela nous mortifie
Oh, je sais bien…les décideurs vont nous dire que c’est pour le bien de l’entreprise, que les restructurations d’aujourd’hui préparent les bénéfices de demain et que ces bénéfices vont permettre la création d’emplois…
Nous, ce que nous voyons, c’est que lorsqu’une entreprise florissante licencie, c’est des familles dans la détresse, amis c’est une action qui monte en bourse et c’est quelques centimes en plus pour les actionnaires. Et ça :
Affectivement, intellectuellement et moralement, c’est inacceptable parce qu’indéfendable.
Dans ce pays qui a écrit les droits de l’homme, dans ce pays qui a toujours défendu la notion de solidarité, dans ce pays qui a donné à l’histoire les plus grands philosophes, on ne peut accepter la politique de « l’ouvrier jetable » ou de « l’emploi kleenex ».
Les manifestations et le boycott symbolique des produits Danone, ne sont que l’expression d’un malaise : d’accord pour un type d’économie puisqu’on nous l’impose ; d’accord pour un type de société, puisqu’on nous l’impose…mais avec un minimum de règles de fonctionnement et de moralité…et je ne pense pas que le libéralisme soit incompatible avec la morale.
Tout cela pour dire, Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, que nous sommes tous des petits Lu et ce que je dis là est valable pour d’autres entreprises.
Depuis la nuit des temps, notre société va, comme un balancier, d’un extrême à l’autre. Je ne doute pas qu’à terme, nous trouverons le juste milieu. C’est l’intérêt de tous.
Le 1er Mai, j’ai pris l’habitude de saluer toutes celles et ceux qui travaillent pour la collectivité, c’est à dire pour la Mairie. Je le fais encore, mais vous comprendrez, qu’aujourd’hui, je fasse témoignage de la tristesse qui touche la grande famille municipale. Monsieur DUMONT, employé municipal depuis plusieurs années, nous a quitté prématurément et de façon inattendue. Il était chargé, à la Mairie, de tous les dossiers cadastres, P.O.S. permis de construire. Ce n’était pas un poste facile et il a toujours fait de son mieux pour servir la collectivité et servir la population. A son épouse, à ses enfants et à sa faille, j’adresse au nom de tous les Guînois, un message de soutien et de compassion.
Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs,
Je devais parler des travailleurs, j’ai parlé du chômage et des licenciements. Mais c’est ça la politique : on parle toujours de ce qui va mal et jamais de ce qui va bien… Mais vous vous doutez bien que ma démarche était volontaire car il est essentiel de rappeler que cette bataille là, nous devons la gagner…Et je suis persuadé, nous la gagnerons, ne serait-ce que pour nos enfants, car ça c’est une vraie motivation.
Hervé Poher