Lille, journée Environord
On m’a demandé de discourir brièvement sur le bilan de la stratégie pour devenir une organisation sobre en carbone.
Pour être franc avec vous, je me suis posé un problème sur la formulation de ce sujet de dissertation appliquée : Comment peut-on faire le bilan, qui par définition est un regard rétrograde, bilan d’une stratégie qui n’a pas encore été définie pour un changement de comportement qui sera futur en intervenant sur les facteurs du présent… Alors, j’ai traduit en français et cela donne :
« Pourquoi nos structures doivent-t-elles devenir plus sobres en carbone ? Quel est l’intérêt de la sobriété ? Comment se désintoxiquer, devenir sobre et ne pas rechuter ? ». Formulé comme cela, la démarche semble plus appréhendable et vulgarisable.
Pourquoi nos structures, organisations ou organismes doivent-ils entrer dans cette démarche ?
Parce que nos organismes (et permettez-moi d’utiliser plutôt ce terme… Organisation, cela fait un peu trop mafieux), parce que nos organismes sont à la fois des chaines de décisions, des chaines d’action, des chaines de relations et des chaines de communication.
Je veux signifier par là que si les organismes comme les nôtres, décident d’une nouvelle façon de vivre et d’exister, l’effet démultiplicateur peut être énorme. Exemple : Quand le département du Pas-de-Calais dira : « Je veux qu’à l’interne, on fonctionne comme cela », ce sont 7000 personnes qui sont directement impliquées.
Quand le département rajoute : « Je veux que tous les partenaires du Conseil Général intègrent les priorités départementales… », on impliquera de fait toutes les intercommunalités qui contractualisent avec le département.
Quand des structures comme les nôtres, qui sont des donneurs d’ordre importants, affirment : « Il faut que nos maitres d’œuvre et que les entreprises qui travaillent pour nous, entrent dans cette démarche vertueuse », il est évident que là aussi, l’effet démultiplicateur peut être énorme.
Mais outre l’effet d’entrainement et l’effet dynamique, ce changement d’attitude est obligatoire, ne serait-ce que pour une chose : l’exemplarité… Car, vous le savez, on ne peut prêcher la vertu que si on est soit même vertueux. C’est valable pour le citoyen, c’est valable pour les collectivités et c’est aussi valable pour l’Etat…
Alors, pour aider cette mutation nécessaire à la fois dans le fonctionnement interne et dans le relationnel externe, il faut se donner des outils. Certains sont sur le point d’être créés et d’autres seront à créer, à généraliser ou à améliorer. Et permettez-moi de ne pas séparer ce qui est du fonctionnement interne de ce qui est du relationnel externe : l’important, dans cette démarche, c’est l’état d’esprit !
Et voici quelques points :
· La création d’un réseau régional de l’éco-responsabilité car on sait que le fonctionnement en réseau est essentiel pour avoir une cohérence publique et surtout pour avoir une efficacité politique. C’est en bonne voie.
· La mise en œuvre d’une charte de l’éco-agent… Et qui ne soit pas qu’un morceau de papier car certains s’inventent de bonne conscience grâce à des chartes comme d’autres jouent aux milliardaires avec des billets de monopoly.
· Il faudra structurer et coordonner les formations concernant l’éco-responsabilité et il faudra surtout informer… Depuis l’avènement d’Internet, nous sommes dans un monde de communication instantanée, d’images avec une possibilité de connaissance universelle qui est presque sans limite. Mais, à contrario, il faut structurer l’information et la rendre accessible à tous. Si le message n’est pas bien structuré, le demandeur a un réflexe de rejet. Un portail spécifique serait un bon vecteur de communication et de sensibilisation.
· Et puisqu’il faut sensibiliser, pourquoi pas imaginer, sur tout le territoire, des lieux d’exemplarité, des vitrines du savoir faire qui seraient aussi un moyen de faire savoir.
· Bien entendu, il faut que nos organismes s’engagent dans le chemin de la vertu pour ce qui est de la gestion de leur patrimoine, de leur fonctionnement interne et de leur logistique.
· Et parce que nous serons sur le chemin de la sobriété, nous pourrons, sans aucun état d’âme, introduire les notions d’éco-conditionnalité dans nos relations avec ce monde que j’appellerai marchand et avec nos partenaires du monde économique.
· Enfin, dans cette démarche qui se veut globale, et afin de toucher le maximum de citoyens, pourquoi ne pas créer une trame… une trame humaine, de couleur indéterminée, trame basée sur le monde associatif, ( car le monde associatif est fortement lié aux collectivités) avec aussi , pourquoi pas, des chargés en communication, et tout ces gens pourraient éduquer, informer et faire la promotion d’éco-événements. Bref, je vous propose de noyauter la société avec des éco-espions, des éco-intoxicateurs et des éco-terroristes…
Voilà un objectif pour nos organismes, nos structures et nos organisations. Et, Mesdames et Messieurs, vous le savez, quand on se donne un but, on définit une stratégie et quand on se donne une stratégie, on essaye de deviner les freins et d’anticiper les problèmes. Et dans ce cadre là, on peut alors évoquer la multiplicité des problèmes, la multiplicité des intervenants, les conséquences financières et j’en passe.
Permettez-moi de dire que tous ces soi-disant problèmes peuvent être et pourront être résolus. Il suffit de le vouloir. Par contre, notre plus grand handicap sera nous-mêmes… Nous, les structures habituées à un fonctionnement bien précis ; nous, les organismes ne supportant que difficilement l’inconnu ; nous les organisations où l’imagination peut être, éventuellement et politiquement tolérée mais où l’utopie est administrativement interdite…
Pour aller vers la vertu écologique et pour afficher la seule véritable ambition utile au 21ème siècle, il nous faudra violenter certains forts en thème qui ont oublié comment s’écrivait le mot « Rêver » ; il nous faudra forcer le passage face à des gens qui ont le formalisme comme costume de travail et qui ont oublié comment s’écrivait le mot « Avenir »; Et il nous faudra batailler dur contre 3 fléaux de notre société : l’habitude, la routine et l’inertie. Si la force d’inertie était vraiment une énergie, on n’aurait plus besoin de pétrole.
Mesdames et Messieurs. Pour en terminer. Nous, les grands organismes, nous devons impulser, initier et inventer ; Mais nous devons, aussi et surtout, être exemplaires. Mais pour cela, nous devrons faire notre révolution culturelle et notre révolution mentale. Je l’avoue, ce n’est pas ce qui est le plus facile mais si la révolution était chose facile, j’en connais qui la feraient tous les jours… Et pas seulement dans les urnes !
Merci de votre attention.
Hervé Poher