Mes chers jeunes.
Rassurez-vous, je serai rapide, bref et direct.
Rapide parce que j’ai réalisé, qu’en français du moins, que les mots enfance, adolescence et espérance riment toujours avec le mot impatience.
Bref parce que la jeunesse a appris à vivre et à parler par internet ou par les SMS en utilisant un langage résumé, phonétique et rapide.
Direct enfin, parce que la jeunesse, et c’est un de ses privilèges, s’accommode mal des tergiversations des adultes et des méandres de la politique. Et dieu sait si la jeunesse a raison !
Alors, allons droit au but avec un constat, une évidence et un conseil.
Un constat tout d’abord : Depuis quelques jours, et cela ne vous a, sans doute, pas échappé, nous sommes officiellement 7 milliards d’humains sur terre. Et nous serons, sans doute, 15 milliards en 2050.
Mais avez-vous remarqué que tous les médias ont évoqué cet événement, qui est très remarquable en soi, avec une joie teintée d’une légère inquiétude. Car tous ont signalé et se sont interrogés sur les problèmes posés par une telle évolution de la démographie mondiale. Et pour tous, médias, scientifiques, politiques, le problème majeur des futures décennies, c’est l’eau, l’accès à l’eau et le rappel de la primauté de l’eau dans tous les processus de vie.
Et vous pouvez aborder le problème de l’eau sous tous les angles, on en revient toujours à une évidence : l’eau symbole de vie ; l’eau symbole de renaissance et l’eau symbole d’espoir. Vie, renaissance, espoir… Trois mots qui s’appliquent, qui se calquent, qui se fondent pratiquement, depuis que le monde est monde, dans l’image de la « jeunesse ».
Et pourquoi ce constat nous interpelle-t-il ? 7 milliards d’humains et un problème majeur avec l’eau.
Pourquoi ce constat nous angoisse-t-il ? Simplement parce que depuis des siècles, nous avons vécu avec une certitude qui n’en était pas une : nous étions certains que l’eau était inépuisable, abondante, recyclable, voire éternelle. Tellement éternelle qu’un jour, un pseudo-scientifique a inventé la mémoire de l’eau… Or, c’est seulement depuis quelques décennies que nous nous sommes aperçus que tout cela est faux, totalement faux. Nous savons maintenant que l’eau n’est pas éternelle, qu’elle n’est pas inépuisable et que les injures faites à l’environnement, et surtout à l’eau, sont parfois irréversibles donc irréparables.
Et cela m’amène à une évidence : Vos parents, vos grands-parents ont été mal élevés, très mal élevés. Et je fais partie de ces gens là, comme beaucoup de personnes, là, devant moi.
Ces personnes là, c'est-à-dire nous tous, avons été élevés avec la certitude que la nature peut tout inventer, peut tout réparer, peut tout cicatriser… Et vous le savez, c’est faux, archifaux ! Nous sommes responsables et coupables de l’état de la planète et pendant des décennies, nous n’avons pas voulu affronter la vérité et admettre notre responsabilité. Un président disait, en parlant de l’environnement : « La maison brule et nous regardons ailleurs. ». Il est plus que temps de regarder certaines choses en face, de dire certaines vérités et de confier à d’autres, à des experts, à des hommes et femmes de bonne volonté, le soin d’essayer de sauver ce qui peut encore l’être et surtout le soin d’enseigner, de semer et de répandre la vertu.
Vous vous dites que qu’inonder le monde de bonnes intentions et de vertu, qu’expliquer aux hommes que le trésor le plus précieux n’est pas fait de diamants, mais de molécules d’eau ; que l’eau est, sans doute, l’investissement le plus urgent pour les 20 prochaines années… Contre ces urgences évidentes, certains vous répondront que dans le contexte mondial actuel, tout cela, c’est du rêve, c’est de l’utopie et iront même jusqu’à vous dire que ce n’est pas très sérieux !!
Mais si la jeunesse se contentait d’être sérieuse, ça se saurait ! Et si la jeunesse n’a plus le droit au rêve, si la jeunesse n’a plus droit à l’utopie, si la jeunesse n’a plus ce devoir d’imagination, ce n’est plus la jeunesse. La différence entre vous, les jeunes, et nous, les moins jeunes, c’est que vous avez encore accès au monde des illusions. Nous avec l’âge, nous avons perdu la clef de ce monde et nous sommes devenus bien trop pragmatiques, bien trop consciencieux, c'est-à-dire bien trop stériles.
Et, je vous le dis, en toute connaissance de cause, il faut vous méfier des gens pragmatique.
Et ceci m’amène à un conseil. Conseil simple : Résistez ! .
Dans ce domaine, comme dans beaucoup d’autres, vous allez être confrontés au conservatisme, au scepticisme, à l’égoïsme et à la dénégation systématique. Alors un seul conseil : Résistez !
Résistez et défendez l’idée face au chiffre. Car, ne vous faites pas d’illusions, face aux idées que vous émettrez, on vous opposera systématiquement des chiffres, des tonnes de chiffres, des montagnes de chiffres, accompagnés des mots « bilan, budget, déficit » ; c’est très tendance et ça permet de justifier beaucoup de choses !
Or pour résoudre les problèmes de la planète, on ne peut se contenter de manipuler des chiffres. Les idées, ça peut servir aussi !
Résistez et défendez l’idéal face au réalisme. C’est encore un privilège de la jeunesse. Car nous, les expérimentés, les décideurs bien en place, j’oserai dire les moins jeunes, nous avons perdu cette faculté d’imaginer le beau et le bon en dehors des contingences économiques ou sociales. Or pour résoudre les problèmes de la planète, on ne peut se limiter à gérer du réalisme. Les idéaux, ça peut servir aussi.
Résistez et défendez la solidarité face au chacun pour soi. Oui, je sais, le mot solidarité, c’est « as been », c’est parfois politiquement incorrect et la solidarité, ça peut coûter. Mais c’est aussi et surtout par la solidarité internationale, et ça nous le savons, que nous pourrons solutionner quelques uns de nos grands problèmes. La solidarité est une arme terriblement efficace contre certains maux de notre planète et le non-accès à l’eau est le mal prioritaire qu’il faut éradiquer. La solidarité n’est pas un handicap économique, c’est un atout humain.
Voilà très rapidement ce que je voulais vous dire. Certains diront que ce sont , une fois de plus, des propos de comptoir, mais j’avais quand même envie de vous les livrer. Sans doute parce que, consciemment ou inconsciemment, nous nous sentons tous responsables de quelque chose… Mais il est vrai que quand nous étions jeunes, nos priorités et nos urgences n’étaient pas les mêmes que les vôtres. Ou c’étaient les mêmes, mais on ne voulait pas les voir…
Aussi, en conclusion, permettez que je résume mon propos :
1) L’urgence pour le monde entier et pour les 20 ans à venir : c’est l’eau
2) Votre devoir, c’est d’essayer de réparer les bêtises que nous avons faites ; nous vous en serons reconnaissants.
3) Résistez à tous ceux qui s’opposeront à vous avec des chiffres, du réalisme ou une courte vue… Osez le rêve ; osez l’audace ; osez l’imagination !
Si vous avez compris ces 3 principes minimum, vous serez digne de nous représenter dans toutes les instances de l’eau et je serai, à titre personnel, tout en assumant mon âge, très fier d’être représenté par des jeunes.
Alors, soyez porteurs d’espérance et de changements. Bref, soyez jeunes et, conseil d’un sexagénaire, essayez de rester jeunes le plus longtemps possible. Ca peut aider dans beaucoup de domaine !
Merci de m’avoir écouté et merci de ce que vous ferez.
Hervé Poher